Appel de textes en cours
Penser la transformation du système de santé et de services sociaux au Québec : la crise pandémique, miroir des vulnérabilités et des défis de demain
Recherches sociographiques sollicite des propositions d’articles en vue de la préparation d’un numéro spécial
Penser la transformation du système de santé et de services sociaux au Québec : la crise pandémique, miroir des vulnérabilités et des défis de demain
Sous la direction de Nancy Côté (Université Laval, VITAM – Centre de recherche en santé durable) et Charles Fleury (Université Laval, VITAM – Centre de recherche en santé durable)
La pandémie de COVID-19 a mis à rude épreuve les systèmes de santé de nombreux pays qui ont dû, dans un court laps de temps et dans un climat d’urgence, réorganiser leur offre de services pour répondre aux impératifs de la crise. Au Québec, ce contexte de forte pression a contribué à exacerber des failles et des vulnérabilités déjà bien présentes avant la pandémie, lesquelles avaient d’ailleurs fait l’objet de nombreux écrits scientifiques et de dénonciations de la part de citoyens, travailleurs et associations professionnelles (Denis et al., 2021; Forest et Martin, 2018; Naylor et al., 2015). Des problèmes persistants aux urgences, des délais d’attente en santé mentale, des iniquités d’accès pour certaines populations, des conditions de travail décriées par le personnel soignant, des pénuries de main-d’œuvre constituent autant d’exemples de dysfonctions qui ont fortement affecté la capacité du réseau québécois de la santé et des services sociaux à faire face à la pandémie. Toutefois, la crise a également été un terreau fertile pour expérimenter de nouvelles façons de faire et mettre en place des pratiques novatrices en réponse à des situations aussi extrêmes qu’inédites (Côté et al., soumis; Breton et al., 2022; Bergeron et al., 2020). Dans ce contexte, il y a lieu de se demander comment ces organisations, qualifiées de bureaucraties professionnelles (Mintzberg, 1995) et traditionnellement caractérisées par une force d’inertie importante, ont été en mesure de favoriser et de soutenir des « poches d’innovation » visant à adapter non seulement leur offre de service, mais également la manière de les dispenser sur une temporalité aussi courte.
La crise pandémique nous semble un excellent prétexte pour réfléchir à la capacité et aux conditions de transformation du système québécois de santé et de services sociaux afin de mieux répondre aux défis de demain, qu’ils soient climatiques, épidémiques, démographiques, etc. À ce propos, le concept de résilience, malgré les critiques dont il fait l’objet (Mikulewicz, 2019; Marquis, 2018), revêt un intérêt heuristique certain (DeVerteuil et Golubchikov, 2016). De plus en plus utilisé par les chercheurs s’intéressant à l’adaptation des organisations de santé dans un contexte de turbulence et de pression intense (Biddle et al., 2020; Iflaifel et al., 2020), ce concept renvoie à la capacité des organisations à faire face à des crises ou des chocs externes importants, voire à en tirer profit pour favoriser le changement et accroître leur performance (Anderson et al., 2020). L’intérêt d’un tel concept est qu’il permet de réfléchir aux transformations des systèmes de santé en interrogeant différentes échelles d’action et en portant attention à leur synergie (Anderson et al., 2020). À l’échelle micro, l’un des piliers centraux de la résilience des systèmes de santé est la main-d’œuvre (Burau et al., 2022; Chamberland-Rowe et al., 2019). Pour faire face aux crises, les systèmes de santé doivent non seulement pouvoir compter sur une main-d’œuvre en nombre suffisant et mobilisée, mais celle-ci doit aussi avoir confiance en son organisation et y être subjectivement engagée (Dubois, 2020; Williams et al., 2020; Dussault, 2015). À l’échelle méso, la résilience interroge les modes de collaboration entre les professions et les secteurs de soins (van Schalkwyk et al., 2020; Nelson et al., 2014), de même que les formes de leadership favorisant l’innovation, les apprentissages des crises passées et la préparation à celles à venir (Kantur et İşeri-Say, 2012). À l’échelle macro, la résilience doit être réfléchie en relation avec des dimensions structurelles plus larges se rapportant notamment aux caractéristiques populationnelles, aux politiques publiques, à la distribution inégale des ressources entre les secteurs de soin, ou encore aux hiérarchies professionnelles, voire même aux contextes sociétaux plus larges qui façonnent l’organisation des services (Anderson et al., 2020; Biddle et al., 2020). La dimension macro constitue la toile de fond qui campe le contexte d’action des organisations de santé et de services sociaux et oriente de manière importante les réponses formulées par les différents acteurs à l’échelle méso et micro.
Cet appel à proposition entend réfléchir à la transformation du système québécois de santé et de services sociaux à partir de différents angles complémentaires, avec comme toile de fond la résilience de ce système dans un contexte de crise. Le numéro vise à réunir des contributions qui s’intéressent tant aux expériences positives qu’aux défis traversés par ce secteur. Sans en faire une condition, nous sommes également intéressés par des textes qui complètent leur analyse empirique par une réflexion sur les enjeux futurs du système québécois de santé et de services sociaux, mais aussi sur le concept de résilience, ses apports et ses limites. Les contributions empiriques attendues pourraient porter sur l’un ou l’autre de ces thèmes :
- Les enjeux de main-d’œuvre, incluant les gestionnaires : pénurie, vieillissement de la main-d’œuvre, diversité, santé mentale au travail, confiance, engagement au travail, travail émotionnellement exigeant, etc. ;
- Les conditions de l’innovation et de sa pérennisation : gouvernance, leadership, nouveaux modes de collaboration, pratiques innovantes, formation et nouvelles compétences à acquérir en contexte d’innovation, etc. ;
- Les nouveaux modes de travail liés à la pandémie (ex. télétravail, télémédecine, etc.),
- La redéfinition de l’offre de service pour mieux répondre aux populations en situation de vulnérabilité: ex. personnes aux prises avec un problème de santé mentale, personnes en situation de pauvreté, autochtones, communautés ethnoculturelles, LGBTQI2S+, etc.
Nous invitions des chercheur.e.s de diverses disciplines (sociologie, relations industrielles; travail social; médecine; sciences infirmières; management; histoire, etc.) à contribuer à ce numéro. Les propositions abordant ces enjeux dans une perspective historique, spatiale et/ou comparative (nationale et internationale) sont également bienvenues.
Revue pluridisciplinaire, Recherches sociographiques ne publie que des articles originaux faisant état de recherches empiriques sur le Québec et le Canada francophone.
Modalités et calendrier
Les propositions d’article (300 mots) devront parvenir aux coordinateurs du numéro avant le 1er septembre 2023 à :
Nancy.cote@soc.ulaval.ca ou Charles.fleury@rlt.ulaval.ca
Et les articles dont la proposition aura été acceptée seront soumis avant le 1er avril 2024. Ils seront d’une longueur de 20 à 25 pages, double interligne (pour un maximum de 8000 mots, notes incluses). L’auteur.e devra également joindre un résumé de 100 mots et une liste de mots-clés.
Les auteur.e.s sont prié.e.s de suivre le protocole disponible sur le site de la revue :
https://www.soc.ulaval.ca/recherchessociographiques/normes-dedition
Références
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Breton, M., Marshall, E. G., Deslauriers, V., Smithman, M. A., Moritz, L. R., Buote, R., Morrison, B., Christian, E. K., McKay, M., Stringer, K., Godard-Sebillotte, C., Sourial, N., Laberge, M., MacKenzie, A., Isenor, J. E., Duhoux, A., Ashcroft, R., Mathews, M., Cossette, B., Hudon, C., McDougall, B., Guénette, L., Kirkwood, R. et Green, M. E., (2022). « COVID-19 – an opportunity to improve access to primary care through organizational innovations? A qualitative multiple case study in Quebec and Nova Scotia (Canada) ». BMC health services research, 22(1) : 1-18.
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Côté, N., Freeman, A., Denis, J. L., Dionne, É., Menear, M., Gagnon, M.-P. et Laverdière, D., (soumis). « Primary care transformation in times of pandemic: rapid reforms focused on outreach approaches and inter-sectoral collaboration to better serve vulnerable populations ». Health Reform Observer – Observatoire des Réformes de Santé.
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van Schalkwyk, M. C., Bourek, A., Kringos, D. S., Siciliani, L., Barry, M. M., De Maeseneer, J. et McKee, M., (2020). « The best person (or machine) for the job: Rethinking task shifting in healthcare ». Health policy, 124(12) : 1379-1386.
Williams, G., Scarpetti, G., Bezzina, A., Vincenti, K., Grech, K., Kowalska-Bobko, I., Sowada, C., Furman, M., Gałązka-Sobotka, M. et Maier, C., (2020). « How are countries supporting their health workers during COVID-19 ». European Journal of Public Health, 31(2) : 58-62.
L’état québécois en débat de 1945 à nos jours : une perspective multidisciplinaire
Recherches sociographiques sollicite des propositions d’articles en vue de la préparation d’un numéro spécial
L’état québécois en débat de 1945 à nos jours : une perspective multidisciplinaire
Sous la direction de Antoine Brousseau Desaulniers, postdoctorant à l’École nationale d’administration publique et chercheur au Groupe d’études et de recherche sur l’international et le Québec et Stéphane Paquin, professeur titulaire à l’École nationale d’administration publique et directeur général du Groupe d’études et de recherche sur l’international et le Québec
Depuis plusieurs décennies, la Révolution tranquille a été interprétée de diverses manières sur le plan de ses caractéristiques et de sa durée (Bélanger, Comeau et Métivier, 2000; Linteau, 2000; Thomson, 1984). En dépit de ces différentes interprétations, il est tout de même un lieu commun d’affirmer que le train de réformes politiques qui ont marqué les années 1960 et 1970 ont par leur somme donné naissance à l’interventionnisme étatique et à l’État québécois moderne (McRoberts et Postgate, 1993). Ce développement rapide de l’État québécois a été initialement porté par un nationalisme revendicateur qui concevait cet État comme le principal outil pour favoriser la modernisation, l’épanouissement et la prospérité de la société francophone du Québec (Pâquet et Savard, 2021).
Ces transformations de l’État québécois ont été étudiées plusieurs fois sous l’angle de ses différents champs d’action, par exemple son rôle dans le développement économique notamment par l’entremise de sociétés d’État (Bélanger, 1998; Bernier, 1994; Rioux, 2022), la santé et les politiques sociales (Guérard, 1996; Vaillancourt, 1988), l’éducation (Dorais et Lessard, 2016), la culture (Trudel, 2021), l’environnement (Chaloux, 2022; Poirier, 2018), les relations internationales (Paquin, 2006). Il n’en demeure pas moins que plusieurs aspects restent à étudier.
Si, par exemple, la période des années 1960 à 1980 a été largement traitée dans les travaux sur la Révolution tranquille, force est de constater que les travaux récents et de qualité pour la période s’étendant de 1945 à 1960 sont plutôt rares. Hormis des études – fondatrices – sur les transformations de l’État sur la longue durée (Gow, 1986; Sarra-Bournet, 2016), la littérature est mince sur les caractéristiques et les modes de fonctionnement de l’État québécois avant 1960, du moins par rapport à celle qui étudie l’État québécois depuis la Révolution tranquille. Ainsi, porter le regard sur l’État québécois sous les gouvernements de Maurice Duplessis de l’après-guerre, plutôt que de se limiter à ses discours, approfondirait notre compréhension des origines de l’État-providence québécois à l’époque où Ottawa accélère son propre projet étatique (Marshall, 1998).
Un autre débat fondamental se situe sur les transformations de l’État québécois depuis 40 ans. Pour certains, l’État québécois est frappé de plein fouet par le tournant néolibéral des années 1980 qui n’aurait pas épargné le Québec. Pour certains, c’est le gouvernement du Parti Québécois (PQ) qui serait le premier responsable de ce virage dès 1983 lorsqu’il adopte, sous la menace, une loi de retour au travail pour mettre fin à la grève des enseignants. L’adoption de cette loi représenterait le moment où le consensus sur l’État-providence au Québec se briserait. Ce mouvement lancé au Québec par le PQ aurait été poursuivi et amplifié par les gouvernements de Robert Bourassa à partir de 1985 et par la suite de Jacques Parizeau, Lucien Bouchard et Bernard Landry dans les années 1990-2000 et finalement par les gouvernements libéraux de Jean Charest et de Philippe Couillard par la suite tout comme lors de l’intermède de Pauline Marois. Ces gouvernements couperaient dans les dépenses publiques et le financement de l’État-providence, mettraient en place des privatisations, se donneraient pour objectif d’atteindre le déficit zéro et développeraient un programme d’austérité. Ces politiques sont souvent présentées comme des nécessités pour que le Québec puisse se conformer à la mondialisation et aux accords commerciaux comme l’Accord de libre-échange canado-américain de la fin des années 1980 et l’Accord de libre-échange nord-américain de 1993 (Groulx, 2009; Pâquet et Savard, 2021; Petitclerc et Robert, 2018; Rouillard, Gagnon et Montpetit, 2008).
Pour plusieurs autres chercheurs cependant, il est exagéré de parler de virage néolibéral dans les années 1980 et 1990. Contrairement aux appréhensions de nombreux chercheurs, l’État québécois n’aurait pas été démantelé pour faire face à la mondialisation en raison des accords de libre-échange, nonobstant quelques reculs à la marge, et n’aurait pas été la victime collatérale d’un « vent de droite qui provient de l’Ouest », pour reprendre les mots de Lucien Bouchard lors de la campagne référendaire de 1995. S’il est vrai que le début des années 1980 a été difficile en raison de la récession de 1982, des hauts taux de chômage et de la politique monétaire visant à diminuer l’inflation, il ne se serait pas développé d’appétit pour le néolibéralisme au Québec même si de nombreuses réformes ont été entreprises.
En effet, contrairement à ce qui s’est produit aux États-Unis, dans le reste du Canada et dans plusieurs pays de l’OCDE, le Québec n’a pas été touché par la désyndicalisation. Avec la mise sur pied des fonds de travailleurs de la FTQ en 1983 et de la CSN en 1995, le rôle des syndicats a même été renforcé à cet égard. De plus, contrairement à ce qui est souvent affirmé, le Québec a été peu touché par la vague de privatisations. En effet, la Caisse de dépôt et placement du Québec, Hydro-Québec ou encore la Société des alcools du Québec n’ont pas été privatisées, mais se sont adaptées à la mondialisation (Bernier, 1994; Bernier et Garon, 2003). Finalement, l’État-providence québécois, qui a vécu des années difficiles dans les années 1980, a connu un second souffle dans les années 1990 avec la création de nouveaux programmes sociaux. Ainsi, plutôt que de s’aligner sur la norme néolibérale canadienne ou encore nord-américaine, une crainte formulée par les opposants au libre-échange avec les États-Unis comme au « déficit zéro » dans les années 1990, le modèle social québécois s’est affirmé et différencié encore davantage depuis la seconde moitié des années 1990 avec la mise sur pied de plusieurs programmes sociaux d’importance, notamment sur le plan de la petite enfance, de l’égalité entre les hommes et les femmes, de l’assurance-médicaments, etc. Ainsi, l’État québécois n’est pas plus petit qu’en 1980, 1985 ou 1990, mais bien plus gros même en tenant compte de l’inflation (Fortin, 2022; Guay et Godbout 2012; Noël, 2013, 2019; Paquin et Rioux, 2022; Vaillancourt, 2015; Vaillancourt et Aubry, 2017).
Pour ce projet, nous invitons les chercheurs et les spécialistes à proposer des articles qui donneront lieu à un numéro spécial de la revue Recherches sociographiques portant sur l’État québécois en débat de 1945 à nos jours : une perspective multidisciplinaire. Nous souhaitons recueillir des propositions d’articles qui favoriseront le développement de travaux sur la sociologie historique et l’évolution de l’État québécois. Les propositions peuvent s’inscrire directement dans les débats présentés plus haut ou encore explorer de nouvelles pistes de recherche sur les divers aspects de l’État québécois depuis 1945.
Les propositions peuvent notamment aborder la question de la transformation de l’exécutif (dont l’organisation du pouvoir, le fonctionnement des ministères, les arcanes du Conseil des ministres, etc.), du législatif (des propositions qui toucheraient de près ou de loin au parlementarisme, au fonctionnement du Parlement, par exemple les commissions parlementaires, aux mécanismes de participation citoyenne institutionnelle, etc.) et du judiciaire (comme les effets des chartes québécoise et canadienne et de la révolution des droits sur l’État québécois, le fonctionnement des tribunaux, le processus de nomination des juges depuis 1945 et l’indépendance de la justice, l’organisation de la justice et ses différents organes, etc.).
Dans un premier temps, les personnes intéressées devront fournir, avant le 1er mai 2023, un résumé d’un maximum de 300 mots comprenant un titre et les principales idées qu’elles souhaitent aborder. Le projet fera d’abord l’objet d’un colloque qui se tiendra à l’École nationale d’administration publique de Montréal en mars 2024, puis fera l’objet d’une publication dans Recherches sociographiques si les articles sont acceptés par le processus d’évaluation indépendant de la revue. Les spécialistes de tous les horizons (sociologie, administration publique, science politique, histoire, droit, etc.) sont invités à
Soumettre leurs propositions à :
antoinebrousseaudesaulniers@enap.ca.
BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE
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TRUDEL, Claude, Une histoire du ministère de la Culture (1961-2021), Montréal, Boréal, 2021, 324 p.
VAILLANCOURT, Yves, L’évolution des politiques sociales au Québec, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal, 1988, 513 p.
VAILLANCOURT, Yves, « La co-construction des politiques publiques », dans Jean-Louis LAVILLE et Anne SALMON (dir.), Associations et Action publique, Paris, Desclée de Brouwer, 2015, p. 421-460.
VAILLANCOURT, Yves et François AUBRY, « The Québec Act to Combat Poverty and Social Exclusion: A Case of Democratic Co-construction of Public Policy », dans Gloria DESANTIS et Nick MULÉ (dir.), The Shifting Terrain: Public Policy Advocacy in Canada, Montréal et Kingston, McGill & Queen’s University Press, 2017, p. 200-229.
Femmes, communautés et associations religieuses au Québec : perspectives pluridisciplinaires
Recherches sociographiques sollicite des propositions d’articles en vue de la préparation d’un numéro spécial sur le thème
Femmes, communautés et associations religieuses au Québec :
perspectives pluridisciplinaires
Sous la direction de Florence Pasche Guignard, professeure adjointe à la Faculté de théologie et de sciences religieuses, Université Laval, Catherine Foisy, professeure agrégée au Département de sciences des religions, Université du Québec à Montréal, et Marie-Eve Larivière, doctorante et chargée de cours, École d’Études sociologiques et anthropologiques, Université d’Ottawa.
Les articles de ce numéro thématique interrogeront en premier lieu la dimension collective, communautaire et associative des contributions des femmes à la vie religieuse au Québec, à travers les siècles, et leurs impacts sur la société en général. Au-delà du thème le plus évident, celui des congrégations et autres groupes organisés de femmes catholiques (religieuses, moniales, sœurs), d’autres pistes sont aussi proposées, dans une perspective comparatiste. Les travaux, notamment en histoire, sur les congrégations religieuses féminines (FERRETTI, 2002 ; LAPERLE, 2015 ; FOISY, 2017 ; BERTHOLD, 2019), sont plus nombreux que ceux sur les groupes ou collectifs de femmes laïques ou d’autres traditions religieuses. Ces derniers portent sur des débats de société plus récents, souvent cristallisés autour des femmes et du genre, comme la Loi 21 et plus largement la laïcité (BENHADJOUDJA, 2017 ; FOISY, 2018 ; LAVOIE, 2018 ; ZUBRZYCKI, 2020). Les enjeux de communautés ou associations autochtones, musulmanes, juives et d’autres minorités religieuses gagneraient pourtant à être considérés au prisme du genre et des débats de société, historiques et actuels. Ces perspectives pourraient notamment alimenter les réflexions collectives face aux défis en éducation, en santé et en services sociaux, au patrimoine culturel et religieux, ou encore au sujet des rapports entre minorité(s) et majorité(s) religieuses, mais aussi linguistiques, culturelles, ethniques. De plus, à l’exception des travaux historiques sur les congrégations féminines bien établies, les études portent souvent sur des figures individuelles (GRAVEL, 2013) et parfois dans des perspectives hagiographiques (GOULET, 2009), ou sur celles qui les ont étudiées en prêtant attention aux aspects religieux (DUMONT, 2022). Des perspectives renouvellées permettront de réexaminer comment, sur le plan institutionnel, la Révolution tranquille a opéré un bouleversement dans la place occupée par les congrégations religieuses féminines (PALARD, 2020) et donc dans le leadership social féminin exercé par leurs responsables au sien des secteurs de l’éducation, des services sociaux et de la santé (pour ce dernier, voir LAURIN, 1996 ; et pour les femmes quittant la vie consacrée et communautaire, voir D’ALLAIRE, 1984). Les perspectives comparatistes sont aussi bienvenues dans les articles pour discerner quels sont les enjeux très spécifiques ou, à l’inverse, transversaux à plusieurs communautés, époques ou même régions (urbaines/rurales ; métropoles/en région) au Québec.
Ainsi, les propositions d’articles doivent se concentrer sur (1) le contexte québécois (historique ou contemporain) et porter sur (2) les femmes, (3) les « religions » ou « spiritualités » (au sens large) et (4) une dimension communautaire ou associative (et non pas individuelle ou biographique, même si des figures-clés pourront être évoquées). De plus, trois axes thématiques sont suggérés pour structurer les articles : (1) la santé, (2) l’éducation et (3) la justice sociale. En effet, ces trois axes sont apparus comme les plus importants domaines d’action des femmes en groupe au Québec, avec une mise en avant des notions d’égalité et, plus récemment, d’équité, à travers des actions concrètes (voir bibliographie). Il n’est bien sûr pas nécessaire de traiter des trois axes ensemble dans la même contribution, mais il convient de se concentrer, dans chaque article, sur un « cas d’étude » ou d’en mettre plusieurs en relation autour d’un même axe, avec un minimum de contextualisation pour que des non-spécialistes puissent saisir les enjeux principaux.
Les contributions devraient amener à mieux comprendre les dynamiques et les enjeux autour de notions comme l’autorité et le pouvoir, la capacité à l’action, la motivation collective, les féminismes et en particulier les féminismes religieux, les droits des femmes, les relations entre l’État québécois et les minorités religieuses, la visibilité de l’intersection entre religion et genre à travers l’histoire et dans le contexte québécois contemporain, etc. La « sororité », notion récemment remise de l’avant par plusieurs courants féministes (DELAUME, 2019 ; MANNOORETONIL, 2021), sera aussi considérée sous l’angle religieux et spirituel ainsi que collectif. Certaines contributions pourraient proposer des modèles d’interprétation et d’analyse inédits et tenant compte de facteurs divers, entre autres politiques, pour rendre compte des identités multiples et entrecroisées des femmes au Québec, qui ne sauraient être réduites à leur seule identité religieuse ou communautaire.
En plus de la question de la « vie consacrée » et de l’engagement des femmes, dont les formes et les lieux ont changé à travers le temps (de la quête spirituelle personnelle à l’engagement militant, du couvent à l’OBNL), on vise à traiter aussi des questions de l’héritage spirituel, culturel et patrimonial, particulier du Québec dans ce domaine, des communautés religieuses de femmes. La situation présente de certaines communautés, en particulier catholiques, leurs perspectives d’avenir, et leurs transmissions patrimoniales, sous forme de fiducies, de dons à d’autres institutions (notamment universitaires), de mise en valeur muséale, etc. pourront aussi être abordées. Enfin, toujours au prisme du genre et avec une focalisation sur les aspects collectifs, on pourra aborder des questions comme celles de la transmission des identités religieuses entre femmes, « de mères en filles » (en familles sociales ou spirituelles), de la diversité et de l’intersectionnalité, en lien ou non avec l’immigration et l’intégration. On pourrait demander comment les femmes de groupes minoritaires, qui peuvent subir plus de désavantages et de discriminations de par leur inscription et visibilisation religieuses, trouvent dans leurs propres traditions et de manière collective, des ressources pour y faire face.
Ces sujets feront d’abord l’objet d’un colloque qui se tiendra à l’Université Laval les 18 et 19 juin 2024, mais cet appel de textes pour Recherches sociographiques est ouvert plus largement à toute personne intéressée par ces sujets. Les contributeurs et contributrices sont invités à travailler dans les perspectives historiques, sociologiques, anthropologiques, théologiques, féministes et d’autres, qui sont les leurs habituellement, tout en gardant un esprit d’ouverture à l’interdisciplinarité pour le lectorat de Recherches sociographiques.
Ainsi, ce numéro thématique permettra d’avancer à une synthèse sur le développement du mouvement des femmes au Québec qui tienne compte des engagements religieux de celles-ci et de leurs contributions à l’intérieur, en marge de et même à l’encontre d’institutions religieuses ou politiques dominantes et parfois oppressives (LANCTÔT, 2015)
Cet appel à textes est lancé le 15 mars 2024. Dans un premier temps, il faudra fournir, avant le 1er juillet 2024, un résumé d’un maximum de 300 mots comprenant un titre et les principales idées qui seront abordées. Les codirectrices du numéro offriront une brève rétroaction sur les propositions. Les articles complets, attendus au 6 janvier 2025, suivant les normes de Recherches sociographiques, feront l’objet d’un processus d’évaluation indépendant par la revue. Les spécialistes de tous les horizons (histoire, sociologie, sciences des religions, théologie, études féministes, muséologie, droit, etc.) à soumettre leurs propositions par courriel à :
Florence.Pasche-Guignard@ftsr.ulaval.ca,
Marie-Eve.Lariviere@uottawa.ca
Merci d’indiquer « Proposition pour Recherches Sociographiques » dans le sujet du message.
RÉFÉRENCES et BIBLIOGRAPHIE DE TRAVAIL
NOTE : une bibliographie de travail est disponible ici :
Bibliographie_de_travail-150324.pdf
BENHADJOUDJA, Leila
2017 « Laïcité narrative et sécularonationalisme au Québec à l’épreuve de la race, du genre et de la sexualité », Studies in Religion/Sciences Religieuses, 46, 2 : 272-291.
BERTHOLD, Étienne
2019 Les Sœurs de la Charité de Québec. Histoire et patrimoine social, Québec, Presses de l’Université Laval.
D’ALLAIRE, Micheline
1984 Vingt ans de crise chez les religieuses du Québec, 1960-1980, Montréal, Éd. Bergeron.
DELAUME, Chloé
2019 Mes bien chères soeurs, Paris, Seuil.
DUMONT, Micheline
2022 Des racines si profondes : l'histoire d'une historienne, Montréal, Remue-Ménage.
FERRETTI, Lucia
2002 Histoire des Dominicaines de Trois-Rivières : C’est à moi que vous l’avez fait, Québec, Septentrion.
FOISY, Catherine
2017 Au risque de la conversion : l’expérience québécoise de la mission au XXe siècle (1945-1980), Montréal, McGill-Queen’s University Press. (Coll. Études d’histoire du québec)
FOISY, Catherine
2018 « Représentations du catholicisme et mémoire de la Révolution tranquille : le projet de loi 60 entre spectre et dialogue », dans David Koussens et Catherine Foisy (dir.), Les catholiques québécois et la laïcité, Québec, Presses de l’Université Laval. (Coll. Diversité et Démocratie), pp. 293-310.
GOULET, Denise
2009 Quand l’amour tisse une vie : Mère Marie du Sacré-Cœur (Frédérica Giroux), Fondatrice des Sœurs Missionnaires du Christ-Roi, Montréal, Carte Blanche.
GRAVEL, Claude
2013 La féministe en robe noire : mère Sainte-Anne-Marie. Montréal, Libre Expression.
LANCTÔT, Aurélie
2015 Les libéraux n’aiment pas les femmes : Essai sur l'austérité, Montréal, LUX. (Coll. Lettres libres)
LAPERLE, Dominique
2015 Entre Concile et Révolution Tranquille : Les religieuses au Québec : Une fidélité créatrice, Montréal, Médiaspaul.
LAURIN, Nicole
1996 « Le projet nationaliste gestionnaire. De l’hôpital des religieuses au système hospitalier de l’État », dans Mikhaël Elbaz, Andrée Fortin et Guy Laforest (dir.), Les frontières de l’identité. Modernité et postmodernisme au Québec, Québec, Presses de l’Université Laval, pp. 95-104.
LAVOIE, Bertrand
2018 La fonctionnaire et le hidjab : Liberté de religion et laïcité dans les institutions publiques québécoises, Montréal, Presses de l’Université de Montréal.
MANNOORETONIL, Agnès
2021 « La Sororité, Pour Quoi Faire ? », Études, 12 : 91–91.
PALARD, Jacques
2020 « Les religieuses québécoises en reconversion dans la mouvance de la Révolution tranquille », Études canadiennes / Canadian Studies, 88 : 129-153.
ZUBRZYCKI, Geneviève
2020 Jean-Baptiste décapité. Nationalisme, religion et sécularisme au Québec, Montréal, Boréal.
Les milieux de vie forestiers : un cadre multidisciplinaire pour penser les rapports socioécologiques à la forêt
Recherches sociographiques sollicite des propositions d’articles en vue de la préparation d’un numéro spécial
Les milieux de vie forestiers : un cadre multidisciplinaire pour penser les rapports socioécologiques à la forêt
Co-responsables du numéro :
Annie Montpetit, chargée de cours, Université du Québec en Outaouais
Jean-Philippe Bernard, professeur, Université du Québec en Outaouais
Guy Chiasson, professeur, Université du Québec en Outaouais
Les rapports des groupes humains à la forêt ont fait l’objet d’une panoplie d’études qui transcendent les disciplines et les époques. Au Québec, parmi les premiers à s’y intéresser, on compte l’historien Arthur M. Lower (1936) qui, au tournant du XXe siècle, entreprend de documenter les formes d’exploitation de la forêt canadienne et ses conséquences sur la déperdition de la ressource. Un conservationniste bien de son temps, plus près des intérêts des industriels que des populations qui habitent le territoire et dépendent des ressources pour survivre, Lower allait mettre la table à une histoire environnementale de la forêt, depuis grandement transformée et nourrie de plus d’un siècle de recherches sur la question de son aménagement et de son exploitation. À peu près à la même époque, l’économiste canadien-français Esdras Minville (1944) parlait de « villages forestiers » pour désigner une foresterie communautaire où l’aménagement serait assuré par les paysans plutôt que par les grandes entreprises extractives. Cette idée d’une forêt mise en valeur par et pour les communautés rurales proposée par Minville en pleine crise économique a inspiré, autant au XXe siècle qu’au XXIe siècle, des projets de développement rural par la forêt (Bouthillier et al, 2022). La forêt, ainsi conçue, dépassait la seule logique extractiviste d’une richesse naturelle pour former une composante centrale du devenir de ces collectivités, un milieu de vie.
Empruntant à la fois dans son étymologie aux sciences naturelles et humaines, le concept de milieu de vie sert de synthèse entre le milieu au sens biologique ou écologique (Robic, 1992) et le genre de vie, héritage d’une géographie déterministe qui attribuait à l’environnement dans lequel elle évoluait, les caractéristiques d’une société donnée, et que Paul Vidal de la Blache rejetterait dès le tournant du XXe siècle pour lui substituer l’idée de « possibilisme » (Febvre, 1922; Berdoulay, 2021; Mercier et Deshaies, 2021). L’étude des milieux de vie se distancie de cette vision plus mécaniste des rapports à l’environnement pour plutôt y voir une relation de « médiance », le point milieu d’une transformation concomitante de la nature et des groupes humains qui l’habitent, la définissent, la transforment (Berque, 1990; Da Silva Lira, 2020). Le paysage, la nature, le territoire sont ainsi le produit de l’empreinte humaine, tout autant que ces milieux forment la matrice de l’identité des groupes qui les habitent (Gérard, 2022). Augustin Berque, qui propose de nommer « mésologie » cette étude des milieux, la résume comme une quête
pour obtenir réponse aux questions suivantes : comment, et pourquoi, « en transformant son environnement, une société se transforme elle-même, et ce faisant crée un nouveau milieu, c’est-à-dire une nouvelle relation entre la société et l’environnement »
(Berque, 2014)?
Le milieu de vie s’articule autour d’une vision intrinsèquement historique de ce rapport à l’environnement et aux différentes perceptions de cette nature qu’ont pu avoir, au fil du temps, les groupes humains qui l’ont habitée (Taylan, 2022). Puisque c’est la succession des pratiques humaines et non humaines qui engendrent un milieu, en faire l’histoire permet d’en comprendre la composition, d’y faire sens (Castonguay, 2023). En tant que ressource à extraire, la forêt n’a pas produit les mêmes rapports au milieu, les mêmes aménagements, que ceux issus du changement de vocation entraîné par le déclin de l’industrie et le foisonnement, par exemple, des migrations d’agréments ou de la villégiature. Le milieu de vie constitue du même coup un outil pour comprendre et faire dialoguer la multiplicité de conceptions — disciplinaires, historiques comme contemporaines, occidentales ou non — de cet environnement (Brisson, 2004; Parès, 2020; Castonguay, 2020) et d’en saisir la « cosmophanie, à savoir comment la réalité d’un certain monde apparaît à ceux qui en relèvent. » (Berque, 2014) Par son rejet du dualisme cartésien entre culture et nature, il offre un cadre d’une grande valeur pour appréhender le contexte actuel et les conséquences de l’action anthropique sur l’environnement.
Dans ce numéro spécial sur le milieu forestier, nous invitons les chercheuses et chercheurs de diverses disciplines à nous soumettre des propositions de textes qui s’ancrent dans cette perspective stimulante de la forêt comme milieu de vie. Sans en être une liste exhaustive, les textes pourraient s’articuler autour des questions/thématiques suivantes :
- L’utilisation du concept de milieu de vie pour penser l’histoire de l’exploitation et de l’aménagement des territoires forestiers;
- Les caractéristiques des milieux forestiers dans des perspectives diachronique ou synchronique;
- Quelles temporalités ou périodisations permettent d’illustrer les phénomènes socioécologiques qui caractérisent et façonnent la société et les territoires forestiers ?
- Comment ces milieux de vie se juxtaposent-ils, se conjuguent ou se recoupent ?
- Comment les diverses interprétations de ces milieux forestiers par les sociétés qui s’y rattachent cohabitent-elles ? Entrent-elles en conflit, en dialogue ?
- Comment l’étude de la forêt sous l’angle des milieux de vie permet-elle de documenter les rapports sociaux à la nature et les dynamiques écologiques territoriales ?
- Quel(s) dialogue(s), s’il en est, le concept de milieu de vie peut-il permettre d’établir entre les différentes disciplines dévouées à l’étude de la forêt ?
Les propositions d’articles, d’une longueur d’environ 300 mots, doivent être
transmises à :
Jean-Philippe Bernard (jean-philippe.bernard@uqo.ca),
Annie Montpetit (annie.montpetit@uqo.ca)
ou à Guy Chiasson (guy.chiasson@uqo.ca),
avant le 20 décembre 2024. Les autrices et auteurs recevront une réponse avant le 15 janvier 2025. Les articles sont attendus pour le 1er juin 2025.
Recherches sociographiques publie des travaux de recherche originaux sur le Québec et sur le Canada français. Par son caractère interdisciplinaire, la revue fait appel aux sociologues, politologues, historiens, démographes, économistes, anthropologues, littéraires.
Bibliographie provisoire :
Berdoulay, Vincent. « Le possible chez Vidal de la Blache. » Cahiers de géographie du Québec, vol. 66, no 184-185, avril–septembre 2021, p. 153–162.
Berque, Augustin, La mésologie, pourquoi et pour quoi faire ? Presses universitaires de Paris Ouest, Nanterre, 2014.
Berque, Augustin, « Milieu et identité humaine », Annales de géographie, no 638-639 (2004), p. 385-399.
Berque, Augustin, Médiance de milieux en paysages, Montpellier, Reclus Belin, 2000.
Bouthillier, Luc, Guy Chiasson et Hanneke Beaulieu, “The difficult art of carving space(s) for community forestry in the Quebec regime.”, dans Janette Bulkan, John Palmer, Anne M. Larson, Mary Hobley (dirs), Routledge Handbook on Community Forestry, 2022, p. 15-28.
Brisson, Geneviève. La capture du sauvage : les transformations de la forêt dans l'imaginaire québécois : le cas d'Anticosti, 1534-2002. Thèse de doctorat en anthropologie, Université Laval, 2004.
Canguilhem, Georges, « Le vivant et son milieu », La connaissance de la vie (Paris :
J. Vrin, 1985), p. 129-154.
Castonguay, Stéphane. « La fin de la forêt laurentienne : une géographie forestière de la première mondialisation ». Cahiers de géographie du Québec, vol. 65, no 183, 2020, 269–281.
Castonguay, Stéphane, « L’étude des milieux de vie et de leurs populations : les chantiers d’une géographie historique environnementale au Québec », Canadian Geographies/Géographies canadiennes, 2023, p. 1-10.
Da Silva Lira, Lenice. « Pour une esthétique mésologique : les humanismes environnementaux en question », Sociétés, vol. 148, no. 2, 2020, pp. 45-55.
Febvre, Lucien, La terre et l’évolution humaine. Introduction géographique à l’histoire, Paris, Albin Michel, 1949 (1922).
Gérard, Vincent. « Présentation. La mésologie et les enjeux phénoménologiques de la géographie humaine », Les Études philosophiques, vol. 142, no. 3, 2022, pp. 3-9.
Lower, A.R.M., « Settlement and the Forest Frontier in Eastern Canada », Dans W.A. Mackintosh et W.L.G. Joerg, dir., Canadian Frontiers of Settlement, Volume IX, Toronto, The Macmillan Company of Canada, 1936, p. 1-165.
Massard-Guilbaud, Geneviève, « De la “part du milieu” à l’histoire de l’environnement », Le Mouvement social, n° 200, 2002, p. 64‑72.
Mercier, Guy et Laurent Deshaies. « Paul Vidal de la Blache et le Canada français : une région et une géographie à l’aune de l’Amérique et de la modernité. » Cahiers de géographie du Québec, vol. 66, no 184-185, avril–septembre 2021, p. 131–151.
Minville, Esdras. La forêt. Étude sur notre milieu. Montréal, Fides, 1944.
Parès, Nelly. « Un modèle forestier en transition ? Transformation des valeurs et modes de régulation des usages en forêts méditerranéennes françaises », Cahiers de géographie du Québec, vol. 65, no 183, 2020, p. 283–293.
Ritchot, Gilles, « La géomorphologie dans l’œuvre de Blanchard au Québec. La part de l’utopie », Cahiers de géographie du Québec, vol. 30, n° 80, 1986, p. 161‑173.
Robic, Marie-Claire, dir., Du milieu à l’environnement : pratiques et représentations du rapport homme/nature depuis la Renaissance, Paris, Économica, 1992.
Taylan, Ferhat. Mésopolitique : connaître, théoriser et gouverner les milieux de vie (1750-1900). Paris: Éditions de la Sorbonne, 2022.
Vidal de La Blache, Paul, « Les genres de vie dans la géographie humaine », Annales de géographie, nos 110 et 112 (1911), p. 193-212 et 289-304.
Appels de textes passés
Les élites économiques du Québec
L’étude sociologique des élites économiques est d’autant plus délicate que la notion d’élite est ambivalente, plongée dans une double normativité, positive et négative, faisant pencher tantôt vers l’admiration tantôt vers la critique (Heinich, 2004). Au Québec, c’est à la fin des années 1960 que se multiplient les études sur les élites (Dumont et Montminy, 1966; Falardeau, 1966; Rocher, 1968) alors conçues positivement comme des « agents du procès politique tant par leurs intérêts et leurs positions établis que par la dynamique de leur conscience et de leur organisation » (Laurin Frenette, 1984, p.12). Cette référence s’efface ensuite dans les années 1980 et 1990 dans un contexte de forte croissance de la scolarisation. Domine alors une perspective méritocratique selon laquelle l’éducation constitue le principal facteur de mobilité sociale ascendante (Moulin et Bernard, 2009). Cependant, la dynamique récente de concentration des revenus et du patrimoine a contribué à une remise en cause de l’idée de société ouverte et d’égalité des chances dans les pays où elle a été la plus forte, particulièrement aux États-Unis (Piketty, 2013). Aujourd’hui, les élites économiques sont surtout perçues négativement. Les rémunérations des dirigeants sont considérées exorbitantes, scandaleuses et déconnectées (Laurin-Lamothe et L’Italien, 2015). Les pratiques d’évasion et d’optimisation fiscale des plus riches sont dénoncées (Alepin, 2004; Deneault, 2016). Enfin, les interventions des élites économiques comme agents du procès politique sont critiquées que ce soit à travers les groupes d’intérêt qu’elles financent (Graefe, 2004) ou les fondations privées qu’elles développent et qui innovent dans le domaine de la philanthropie (Leseman, 2011).
Ce numéro a pour objectif d’explorer quelques-unes des dimensions sociales et culturelles de l’étude des élites économiques dans la société québécoise contemporaine. Que nous apprennent les études récentes sur les élites économiques et la mobilité sociale ascendante au Québec? Un premier volet de cette exploration se rapporte à la définition et description de ces élites économiques en termes de composition sociale et professionnelle et d’insertion dans des réseaux sociaux. Qui sont-elles? Quelles sont leurs principales caractéristiques? Quels liens ses membres entretiennent-ils entre eux? Voilà quelques-unes des questions dont pourrait traiter ce premier volet. Un deuxième volet est relatif à l’étude des facteurs d’appartenance à ces élites et conduit à s’interroger, au-delà de l’appartenance professionnelle, sur le rôle respectif des parcours scolaires, de l’origine sociale, de l’héritage, du mariage et du divorce. En outre, ce deuxième volet pourrait inclure quelques archétypes contemporains de la mobilité sociale ascendante, tels que les étoiles médiatiques, grands criminels et sportifs célèbres, encore trop peu étudiés (Moulin et Bernard, 2009). Enfin un dernier volet se rapporte à l’étude de leurs attitudes, de leurs croyances, de leurs valeurs et des représentations d’eux-mêmes et du monde qui les entoure. Quelles valeurs les caractérisent? Dans quelle mesure se distinguent-elles des autres catégories sociales?
Les propositions d’articles, d’une longueur d’environ 300 mots, doivent être transmises à Stéphane Moulin(stephane.moulin@umontreal.ca) ou à Charles Fleury (charles.fleury@soc.ulaval.ca) avant le 15 avril 2017. Les auteurs recevront une réponse avant le 15 mai 2017. Les articles sont attendus pour le 31 janvier 2018. Recherches sociographiques publie des travaux de recherche originaux sur le Québec et sur le Canada français. Par son caractère interdisciplinaire, la revue fait appel aux sociologues, politologues, historiens, démographes, économistes, anthropologues, littéraires.
La francophonie canadienne depuis les années 1980 : débats, mobilisations et projections
Les sociétés occidentales ont été amenées à réfléchir à la refondation de la citoyenneté et du lien social dans un contexte marqué, depuis les années 1980, par l’accélération des mouvements migratoires, des échanges culturels et de la diversité idéologique, culturelle et linguistique (Giroux 1997; Choquet 2015; Aligisakis et Dascalopoulos 2012; Foner et Simon 2015; Tafarodi 2015). Le phénomène leur a imposé la nécessité de trouver de nouveaux équilibres entre l’ouverture à l’altérité et les fondements mémoriels et/ou ethniques qui avaient servi d’appui, historiquement, à leur construction identitaire et nationale (Taylor 1994; Habermas 1995; Kymlicka 2003; Bouchard 2011, 2013). La francophonie canadienne minoritaire a elle aussi été confrontée, au cours des dernières décennies, au défi que posent le pluralisme et la formulation d’une politique de la « reconnaissance » pour le maintien d’une référence identitaire fondée sur la mémoire, c’est-à-dire sur le sentiment de partager une expérience historique commune et originale. Depuis le XIXe siècle, elle avait nourri des ambitions sociétales qui s’étaient incarnées dans l’élaboration d’un vaste projet d’autonomie institutionnelle et référentielle (Dumont 1997; Frenette 1998; Bock 2008). Mais, au cours des dernières décennies, de nombreux facteurs, tant idéologiques, culturels et institutionnels qu’économiques, juridiques et démographiques, ont ébranlé les certitudes traditionnelles des intellectuels et des porte-parole politiques et communautaires des francophonies minoritaires : accélération de l’immigration internationale et d’autres formes de mobilité géographique ; diversification ethnoculturelle et idéologique des locuteurs du français; hybridité culturelle et bilinguisme identitaire; augmentation des taux de transferts linguistiques; avènement du néolibéralisme et retrait de l’État ; polarisation croissante autour des grands centres urbains ; recomposition du référent religieux, etc. (Bernard 1998; Kérisit 1998; Houle et Corbeil 2010; Forest et Gilbert 2010; Garneau 2010; Violette et Traisnel 2010; Meunier, Wilkins-Laflamme et Grenier 2013). Ces transformations ont apporté avec elles de nouvelles interrogations et d’importantes remises en question au sein de l’espace public des communautés francophones, lesquelles ont donné lieu à des débats substantiels et sans cesse renouvelés sur les différents arrimages à la société canadienne qui s’offrent à elles (Heller 1994; Gérin-Lajoie 2004; Pilote et Magnan 2008; Thériault et Meunier 2008; Bock 2016; Bock et Dorais 2016).
S’agissant d’une collectivité minoritaire comme la francophonie canadienne, qui s’interroge sur l’intégration en son sein de communautés ethnoculturelles francophones récemment installées au pays, voire de francophones de langue maternelle anglaise, tout en cherchant à déterminer de manière aussi autonome que possible les modalités de sa propre intégration à la société canadienne globale, les pistes d’analyse s’avèrent particulièrement fécondes. Le numéro spécial pour lequel la revue Recherches sociographiquessollicite des textes offrira une contribution importante à la problématique de l’inscription des petites sociétés et des minorités nationales dans la modernité, voire dans la postmodernité, laquelle attire l’attention de chercheurs provenant de tous les horizons disciplinaires et géographiques (Freitag 1986; Paré 1994; Thériault 2005; Cardinal et Papillon 2011; Koleva 2015). À partir de quel(s) principe(s) instituant(s) la francophonie canadienne cherche-t-elle à s’arrimer, en tant que minorité, à la société canadienne globale? Dans quelle mesure le maintien d’une conception de l’identité franco-canadienne fondée sur la mémoire du Canada français ou de l’Acadie est-il perçu comme étant compatible (ou non) avec le changement social? De quelle manière la francophonie canadienne tente-t-elle de composer avec les tensions entre les forces locales et globales qui contribuent à la redéfinition de ses représentations identitaires et de son imaginaire collectif (Anderson 1996) au moment où les repères de jadis semblent plus incertains que jamais? Quelle configuration prend, au sein de la francophonie canadienne, la tension dialectique entre l’impératif du pluralisme et sa volonté de se constituer en un sujet politique collectif, et quels sont les nouveaux positionnements intellectuels et politiques qui en résultent? Quelles sont les manifestations esthétiques de ces transformations sociodémographiques, idéologiques et discursives, et de quelle manière la création littéraire et artistique nourrit-elle les débats qui en découlent?
Les propositions d’articles, d’une longueur d’environ 300 mots, doivent être transmises à Michel Bock(mbock@uottawa.ca) ou à Yves Frenette (yfrenette@ustboniface.ca) avant le 1er novembre 2017. Les auteurs recevront une réponse avant le 30 novembre 2017. Les articles sont attendus pour le 1er avril 2018. Recherches sociographiques publie des travaux de recherche originaux sur le Québec et sur le Canada français. Par son caractère interdisciplinaire, la revue fait appel aux sociologues, politologues, historiens, démographes, économistes, anthropologues, littéraires.
D’amour et d’encre fraîche. Place et discours de l’amour dans la presse québécoise 20e et 21e siècles)
D’amour et d’encre fraîche. Place et discours de l’amour dans la presse québécoise 20e et 21e siècles
Sous la direction de Marie-Pier Luneau et d’Adrien Rannaud
Recherches sociographiques sollicite des propositions d’articles en vue de la préparation d’un numéro thématique consacré à l’amour, ses pratiques, ses discours et ses représentations en régime journalistique au Québec, depuis le tournant du 20e siècle jusqu’à nos jours.
Ce numéro table sur un double constat. D’une part, on observe depuis quelques années une intensification des études sur la presse au Québec. Dans la foulée des travaux fondateurs d’André Beaulieu et Jean Hamelin (1979-1985), la presse québécoise figure dorénavant au cœur de plusieurs chantiers, non plus en sa qualité de document historique, mais en tant qu’objet d’étude en soi, qui permet le renouvellement des perspectives d’analyse. En témoignent les travaux des équipes « La vie littéraire au Québec » (Saint-Jacques et Robert [dir.], 2010) et « La presse montréalaise de l'entre-deux guerres, lieu de transformation de la vie culturelle et de l'espace public » (Cambron, [dir.]), qui envisagent de façon systématique la presse comme un laboratoire des pratiques culturelles et littéraires. Les résultats produits par ces équipes éclairent d’un jour nouveau l’histoire de la communication au Québec, en misant autant sur ses acteurs et ses pratiques que sur les discours et les supports qui fondent le régime et l’imaginaire médiatiques (Pinson, 2013).
D’autre part, le discours amoureux, dont Roland Barthes disait qu’il était « d’une extrême solitude » (1977), fait l’objet d’un regain d’intérêt de la part des sciences humaines et sociales québécoises. Outre un récent numéro de la revue étudiante Postures consacré aux langages poétiques de l’amour (Godin et Pelletier [dir.], 2015), relevons un dossier de la revue Sociologie et sociétés qui s’intéresse précisément à l’intimité amoureuse (Piazzesi [dir.], 2014). Le sentiment amoureux constitue en ce sens le point de départ de recherches plus poussées invitant à repenser les relations entre individus, sociétés et institutions à travers le prisme des expériences collectives et personnelles, et de l’imaginaire qui en découle.
Le présent dossier fait le pari de croiser ces deux grands chantiers d’étude, en s’attachant à comprendre la place qu’accorde la presse à l’amour au Québec et, inversement, à tenter de saisir l’éventail des discours, des représentations, des poétiques et des pratiques médiatiques qui ont accaparé le sentiment amoureux dans les revues et journaux québécois. En effet, nous partons de l’hypothèse que la maturation nouvelle de la presse, qui se met en place dès le tournant de 1900 et se poursuit tout au long du 20e siècle, est corrélée à un processus progressif, mais croissant, consistant à accorder de plus en plus de visibilité à l’amour dans l’espace public (diversification des modèles de couples, publicisation et commercialisation des relations intimes, mise en avant des désirs et de la notion de plaisir). Si la radio, la télévision, le cinéma et, maintenant, Internet propulsent de nouvelles façons de « dire » et de faire « l’amour », les périodiques cristallisent et façonnent aussi les rapports amoureux, en constituant des réservoirs d’information et de prescription, et en participant à l’incubation et au déploiement de récits qui modèlent la société québécoise.
C’est sur cette voie que nous sollicitons des propositions portant sur le corpus québécois et issues de l’ensemble des disciplines de sciences humaines et sociales : histoire, communication, études littéraires et culturelles, sociologie, ethnologie, psychologie, philosophie, archivistique. Dans une perspective résolument interdisciplinaire et inclusive, nous envisageons la presse selon un large spectre de pratiques, de supports et de discours permettant des études sur les espaces de consommation (publicité), d’information et de fiction qui forment le corpus médiatique ; les différents types de périodiques (du quotidien au magazine, du bulletin d’information au fascicule) ; et les pratiques de lecture et d’appropriation des discours liés à l’imaginaire amoureux dans l’objet « journal ».
Les sujets suivants, qui ne constituent pas une liste exhaustive, pourront être abordés, à partir d’exemples québécois :
- la manifestation de l’amour dans le journal quotidien : quel rapport à la périodicité « au jour le jour » ? à l’événement ? au fait divers ? Y a-t-il place pour l’amour dans le traitement de l’information et le bruissement du monde qui résonne à l’intérieur du journal ?
- amour et culture médiatique au féminin : comment expliquer l’importance significative qu’accordent les chroniques et revues féminines à l’amour (tests psychologiques, courriers du cœur, rubriques sur le « bonheur à deux ») ? Quelles sont les grandes tendances qui se démarquent dans ces espaces journalistiques, en termes d’objectifs discursifs (informer, prescrire, conseiller), de représentations, de postures féminines d’« amoureuses » ? Et en quoi ces tendances nous informent-elles sur la nature et les pratiques du lectorat visé, souvent directement sollicité par ces rubriques ?
- l’amour chez les célébrités, entre flashs et potins : à mi-chemin entre le privé et le public, la vedette centralise l’attention du public, tout particulièrement autour de son intimité amoureuse. Quelles scénographies du vedettariat peut-on dégager à partir de la presse ? Comment les couples célèbres sont-ils exploités afin de former une nouvelle mythologie des sentiments amoureux ?
- « parlez-moi d’amour » dans les marges : quels sont les discours tenus sur l’amour dans les publications plus spécialisées dans l’espace social (tracts, presse féministe, gaie, etc.) ? Quelles sont les différences et lieux partagés avec la presse dite « généraliste » ? Comment ces différents supports, qui s’adressent à des publics plus spécialisés, infléchissent-ils l’imaginaire amoureux et sous quelles modalités idéologiques ?
Les propositions d’articles en français, comprenant un résumé d’environ 250 mots ainsi qu'une courte notice biographique, devront parvenir à Adrien Rannaud (Adrien.rannaud@gmail.com) par courriel d’ici le 15 août 2019. Les directeurs du numéro donneront une réponse (acceptation ou refus) au plus tard le 30 août.
Les articles dont la proposition aura été acceptée seront attendus au plus tard le 30 novembre 2019. Ils devront être d’une longueur de 20 à 25 pages à double interligne (pour un maximum de 8 000 mots, notes comprises). L’auteur.e doit également joindre un résumé de 100 mots et une liste de mots-clés. Les textes seront acheminés à Recherches sociographiques par voie électronique (rechsoc@soc.ulaval.ca). Ceux-ci seront soumis au processus habituel d’évaluation scientifique par les pair.e.s. Les auteur.e.s sont prié.e.s de suivre le protocole de rédaction disponible sur le site de la revue :
https://www.soc.ulaval.ca/recherchessociographiques/
Communs, autogouvernement et initiatives collectives au Québec: les nouvelles formes de la coopération et de l’innovation sociale émancipatrice
Recherches sociographiques sollicite des propositions d’articles en vue de la préparation d’un numéro spécial sur le COMMUNS, AUTOGOUVERNEMENT ET INITIATIVES COLLECTIVES AU QUÉBEC: LES NOUVELLES FORMES DE LA COOPÉRATION ET DE L’INNOVATION SOCIALE ÉMANCIPATRICE
Depuis le début du XXIe siècle, nous assistons à une nouvelle vague d’initiatives collectives prenant les formes de coopération socio-économiques novatrices qui mobilisent notamment les revendications politiques des communs, de l’autonomie, de l’autogouvernement ou de la réappropriation d’espaces pour reconstruire du lien social et entamer une transition écologique (Dardot et Laval, 2014; Coriat, 2015; Hess, 2008; Bollier et Helfrich, 2012). Des projets comme la gestion commune de ressources, la réappropriation collective d’espaces urbains, les tiers-lieux, l’urbanisme tactique, les monnaies alternatives, les Fab Lab, les éco-changes ou les projets de jardins communautaires augmentent, gagnent en visibilité et deviennent de plus en plus efficaces (Carlson, 2008; Saunders, 2014; St. Martin, 2009). Le Québec ne fait pas exception. Nous observons dans la province une multiplication de ces initiatives, dont certaines, mais pas toutes, se revendiquent explicitement du terme « commun ». Nous soulignons les collectifs de transformation locale et écologique (Solon, Champ des Possibles, Temps Libre, La Pépinière, Récolte, Coop Carbonne, CERSE, l’Esplanade), d’agriculture urbaine (NousRire, Craque Bitume, La Ligne Verte, les Urbainculteurs), de design social (Espaces temps), d’ateliers collaboratifs (La Patente, La Remise), d’urbanisme tactique (espaces éphémères) et de réappropriation d’espaces (Bâtiment 7, Espaces d’initiatives).
Malgré la relative nouveauté de ces types d’initiatives, on remarque qu’elles empruntent la plupart du temps des modes d’organisations traditionnels issus de l’économie sociale, soit les coopératives, les associations et les OBNL. S’il est vrai que le mouvement de l’économie sociale en général et le mouvement coopératif en particulier connaissent un essor au XXIe siècle (Favreau et Hébert, 2012; Draperi, 2012), plusieurs considèrent qu’il leur manque un projet et un leadership politique afin de pouvoir se positionner comme une vraie alternative aux failles du système économique dominant (Favreau, 2010; Draperi, 2012; Wright, 2014; Borrits, 2015). Suivant Borrits (2018 : 17), « [s]i la forme coopérative d’entreprise reste un cadre largement utilisé dans les expériences alternatives [comme les communs], le mouvement coopératif international s’est aujourd’hui tellement institutionnalisé qu’il ne constitue plus une force transformatrice ». Dans cette perspective, la revendication des communs peut-elle être le signe d’un changement de paradigme par l’émergence d’une vision plus politisée et transformatrice de l’économie sociale? Quelles spécificités, continuités historiques et différences entre les formes traditionnelles de l’économie sociale et celles plus actuelles se revendiquant des communs? Bref, assiste-t-on à un renouveau et/ou une politisation de l’économie sociale au Québec via l’émergence de nouveaux projets socio-économiques plus radicaux, appelant à l’autogouvernement, la libération du travail et la construction d’utopies réelles pour bâtir une société post-capitaliste (Wright, 2020)?
Ce numéro vise à explorer les dimensions sociales, économiques, historiques, culturelles et artistiques des nouvelles formes de coopération, de communs et d’autogouvernement au Québec, incluant des exemples chez les peuples autochtones, comme la Coop Nitaskinan. L’objectif n’est pas de tracer un portrait exhaustif des initiatives collectives sur l’ensemble du territoire, mais de proposer une analyse de la signification politique de ces phénomènes.
Voici les trois travaux de recherche suggérés:
- Travaux empiriques/enquêtes : expériences concrètes ayant émergé au Québec dans les deux dernières décennies.
- Travaux historiques : genèse et évolution de l’économie sociale, des expériences d’autogouvernement/autogestion et des communs au Québec.
- Travaux comparatifs : analyse comparative entre un cas québécois et un ou plusieurs cas ailleurs au Canada ou à l’étranger.
Pour soumettre une contribution à ce numéro spécial, les auteur.trice.s sont invité.e.s à nous faire parvenir en premier lieu une proposition d’article comprenant les informations suivantes :
- Nom de ou des auteur.trice.s, incluant l’affiliation, les coordonnées complètes ainsi qu’une courte notice biographique;
- 3 à 5 mots-clés;
- Proposition d’article sous forme de résumé (entre 250 et 500 mots, police Times New Roman 12 pts, double interligne), incluant une problématique, l’approche méthodologique privilégiée et un minimum de 5 références bibliographiques.
Les contributions soumises par des étudiant.e.s ou des chercheur.euse.s émergent.e.s sont encouragées.
Les propositions d’articles doivent être transmises à Dan Furukawa Marques (dan.furukawa-marques@soc.ulaval.ca) et à Jonathan Durand Folco (jdurand@ustpaul.ca ). Pour toute question, veuillez communiquer avec nous par ces mêmes courriels.
CALENDRIER
17 février 2021: lancement de l’appel à communication
15 avril 2021: date limite pour soumettre une proposition
3 mai 2021: notification aux autrices et auteurs de l’acceptation de leur proposition
30 septembre 2021: date limite pour la remise des articles par les autrices et auteurs
Recherches sociographiques publie des travaux de recherche originaux sur le Québec et sur le Canada français. Par son caractère pluridisciplinaire, la revue fait appel aux sociologues, politologues, historiens, démographes, économistes, anthropologues, littéraires.
RÉFÉRENCES
Bollier, David and Silke Helfrich. 2012. The Wealth of the Commons: A World Beyond Market and State. Amherst: Levellers Press.
Borrits, Benoît. 2018. Au-delà de la propriété. Pour une économie des communs. Paris : La Découverte.
Borrits, Benoît. 2015. Coopératives contre capitalisme. Paris : Éditions Syllepse.
Carlsson, Chris. 2008. Nowtopia. How Pirate Programmers, Outlaw Bicyclists, and Vacant-Lot Gardeners Are Inventing the Future Today. Edinburgh, PM Press.
Coriat, Benjamin. 2015. Le retour des communs. La crise de l’idéologie propriétaire. Paris : Les liens qui libèrent.
Dardot, Pierre et Christian Laval. 2014. Commun. Essai sur la révolution au XXIe siècle. Paris, La Découverte.
Draperi, Jean-François. 2012. « Pour un renouveau du projet politique du mouvement coopératif ». Vie Économique 3(4) : 1-10.
Favreau, Louis, 2010. Mouvement coopératif. Une mise en perspective. Québec : Presses de l’Université du Québec.
Favreau, Louis et Mario Hébert. 2012. La transition écologique de l’économie. La contribution des coopératives et de l’économie solidaire. Québec : Presses de l’Université du Québec.
Saunders, Fred P. 2014. « The Promise of Common Pool Resource Theory and the reality of Common Projects ». International Journal of the Commons, 8(2): 636-656.
St. Martin, Kevin. 2009. « Toward a Cartography of the Commons: Constituting the Political and Economic Possibilities of Place », The Professional Geographer, 61(4): 493-507.
Wright, Chris. 2014. Worker Cooperatives and Revolution. History and Possibilities in the United States. Bradenton: Book Locker.
Wright, E. O. 2020. Stratégies anticapitalistes pour le XXIe siècle. Paris: La Découverte.
Réalignement et transformation de la vie politique québécoise : conséquences et perspectives
Recherches sociographiques sollicite des propositions d’articles en vue de la préparation d’un numéro spécial sur le RÉALIGNEMENT ET TRANSFORMATION DE LA VIE POLITIQUE QUÉBÉCOISE : CONSÉQUENCES ET PERSPECTIVES.
Depuis plusieurs années, le paysage politique québécois se transforme. Ces changements semblent par ailleurs s’être accélérés au cours des derniers cycles électoraux. La nature des enjeux politiques, le renouvellement des actrices et des acteurs du système politique (compris ici au sens large) ainsi que le comportement de l’électorat apparaissent comme étant des indicateurs d’une mutation en cours.
Premièrement, le clivage souverainisme-fédéralisme, dominant la scène politique québécoise depuis la Révolution tranquille, semble s’effacer progressivement au profit d’autres enjeux s’inscrivant davantage sur l’axe gauche-droite (Grégoire et al., 2016; Nadeau et Bélanger, 2013). Les questions identitaires, autant nationales, collectives, qu’individuelles, se transforment et gagnent en visibilité dans le discours politique et au sein de la société québécoise. En ce sens, la polarisation des idées, la montée du populisme et de la crise de la démocratie représentative apparaissent comme étant des avenues de recherche prometteuses, ici comme ailleurs.
Deuxièmement, nous observons également un éclatement de la scène partisane québécoise. Le déclin des partis traditionnels – particulièrement du Parti québécois (Dufour et Montigny, 2020) parfois qualifié de « parti générationnel » (Lemieux, 2011) – au profit d’autres partis autrefois marginaux, additionné d’un renouvellement de l’élite politique, modifient la composition des acteur.trice.s et des institutions de la vie politique. Bien que l’élection de 2018 semble consacrer ce réalignement (Bélanger et Daoust, 2020), on observe cette dynamique depuis le scrutin de 2012 (Bodet et Villeneuve-Siconnelly, 2020)
Finalement, nous constatons des changements dans le comportement de l’électorat et dans les façons de militer politiquement. Cela s’observe autant chez les partis (ex. baisse du nombre d’adhérent.e.s) que dans les sphères d’action politique non-institutionnalisées (ex. formes de contestation). Ajoutons que non seulement les valeurs des Québécois.e.s semblent évoluer (Grégoire et al., 2016), mais que l’arrivée de nouvelles générations d’électrices et d’électeurs contribuent aussi à créer de nouvelles dynamiques (Gélineau, 2015; Montigny et Cardinal, 2019).
Bien que les études électorales portant sur le Québec aient maintenu l’intérêt des chercheur.euse.s depuis les 50 dernières années (Chouinard, 2017), les réalignements qui marquent la politique québécoise – comme leurs impacts sur la vie démocratique – doivent être mieux compris. Quelles sont leurs ramifications dans le système politique, auprès de ses acteur.trices et pour la société québécoise en général?
Ce numéro spécial de Recherches sociographiques a pour objectif d’analyser comment s’articule le réalignement en cours de la vie politique québécoise. Quels en sont les conséquences politiques, partisanes et sociales? Comment les actrices et les acteurs politiques s’adaptent à ces changements et comment pouvons-nous interpréter les effets de leurs actions? À qui profite cette situation et quels sont les impacts réels et potentiels de cette mutation sur la société québécoise?
Le numéro spécial rassemblera des articles produits par des chercheur.euse.s issu.e.s de des sciences sociales ou d’autres disciplines apparentées. Ces articles pourraient notamment aborder les thématiques de recherche suivantes, dans une perspective comparative ou non :
- La communication et les stratégies politiques à l’ère du réalignement;
- Les impacts du réalignement au regard des enjeux politiques contemporains (ex. nationalisme, populisme, extrémisme, remise en question de la démocratie représentative, etc.);
- L’histoire politique québécoise;
- La culture et les valeurs politiques;
- Le comportement électoral et la participation citoyenne;
- Les clivages politiques;
- Les identités (nationales, collectives ou individuelles);
- Le militantisme;
- Les partis politiques;
- Les questions de la justice sociale.
SOUMISSION D’UNE PROPOSITION DE CONTRIBUTION
Pour soumettre une contribution à ce numéro spécial, les auteur.trice.s sont invité.e.s à nous faire parvenir en premier lieu une proposition d’article comprenant les informations suivantes :
- Nom de ou des auteur.trice.s, incluant l’affiliation, les coordonnées complètes ainsi qu’une courte notice biographique;
- 3 à 5 mots-clés;
- Proposition d’article sous forme de résumé (entre 250 et 500 mots, police Times New Roman 12 pts, double interligne), incluant une problématique, l’approche méthodologique privilégiée et un minimum de 5 références bibliographiques.
Les contributions soumises par des étudiant.e.s ou des chercheur.euse.s émergent.e.s sont encouragées.
Ce numéro spécial est dirigé par les doctorant.e.s Philippe Dubois et Katryne Villeneuve-Siconnelly, ainsi que par les professeurs Thierry Giasson et d’Eric Montigny, toute et tous du Département de science politique de l’Université Laval. Toute demande de renseignements supplémentaires peut leur être adressée par courriel.
Les propositions doivent être envoyées par courriel à Philippe Dubois philippe.dubois.3@ulaval.ca et Katryne Villeneuve-Siconnelly katryne.villeneuve-siconnelly.1@ulaval.ca avant le
1er février 2021.
CALENDRIER
21 décembre 2020 : Lancement de l’appel à contributions
1 février 2021 : Date limite pour la soumission d’une proposition
15 février 2021 : Notification aux auteur.trice.s de l’acceptation de leur proposition
15 juillet 2021 : Date limite pour la remise de l’article par les auteur.trice.s
RÉFÉRENCES
Bélanger, Éric et Jean-François Daoust, 2020, « A night to remember: perspectives on the watershed 2018 Quebec election », French Politics, 18 : 213-220.
Bodet, Marc André et Katryne Villeneuve-Siconnelly, 2020, « Effective support and electoral dynamics in Quebec », French Politics, 18 : 221-237.
Chouinard, Stéphanie, 2017, « Les études électorales au Québec depuis 1970 ou l’analyse de l’exceptionnalisme québécois aux urnes », Revue canadienne de science politique, 50, 1 : 369-376.
Dufour, Pascale et Eric Montigny, 2020, « À l’occasion des 50 ans du Parti québécois : comment le déclin d’un parti nous renseigne sur les transformations politiques et sociales d’une société? », Politique et Sociétés, 39, 3 : 3-17.
Gélineau, François, 2015, « Poids électoral : la revanche de la génération X », dans : Dans Anick Poitras (dir.), L’État du Québec 2015, Montréal, Del Busso Éditeur.
Grégoire, Marie, Eric Montigny et Youri Rivest, 2016, Le cœur des Québécois. De 1976 à aujourd’hui, Québec, Les Presses de l’Université Laval.
Lemieux, Vincent, 2011, Les partis générationnels au Québec. Passé, présent, avenir, Québec, Presses de l’Université Laval.
Montigny, Eric et François Cardinal (dir.), La Révolution Z. Comment les jeunes transformeront le Québec, Montréal, Les Éditions La Presse.
Nadeau, Richard et Éric Bélanger, 2013, « Un modèle général d’explication du vote des Québécois », dans : Frédérick Bastien, Éric Bélanger et François Gélineau (dir.), Les Québécois aux urnes. Les partis, les médias et les citoyens en campagne, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal.
Les petites sociétés vues du Québec : bilan et prospective
Recherches sociographiques sollicite des propositions d’articles en vue de la préparation d’un numéro spécial : Les petites sociétés vues du Québec : bilan et prospective
« La plupart des comparaisons, que ce soit en Occident ou avec des pays en voie de développement, se sont limitées aux plus grandes et aux plus influentes unités sociales et ont eu tendance à négliger les expériences riches et variées des petites entités politiques, en particulier les nombreux ‘États sécessionnistes’ européens après 1814, 1830 et 1918, et leurs histoires de construction nationale: ce sont, après tout, les entités les plus immédiatement comparables aux États récemment formés au Tiers-monde. »
Stein Rokkan, 1971, p. 10-11[1]
La taille des sociétés revêt un intérêt de connaissance classique auquel réfléchissaient déjà d’illustres penseurs tels Platon, Aristote, Montesquieu et Rousseau (Dahl and Tufte, 1973). Il s’agit aussi d’un enjeu contemporain, celui d’un monde globalisé où les grands États-nations font de moins en moins figure de modèles universels. Selon le politologue catalan Joseph M. Colomer, deux tiers de la population mondiale vivrait aujourd’hui dans une « petite nation » (2007). C’est dire que sous diverses acceptations que résume la notion de « petites sociétés » (petites nations, petits États, petits pays, micro-États, sociétés insulaires, etc.), celles-ci posent autrement les enjeux de la politique internationale (Steinmetz et Wivel, 2010), les opportunités du marché mondial (Van Den Bulcke, Verbeke et Yuan, 2009), les normes démocratiques et étatiques (Keating et Harvey, 2014), les formes de nationalisme (Laniel et Thériault, 2020) et les imaginaires collectifs (Delsol, Maslowski et Nowicki, 2002), pour ne nommer qu’eux.
En effet, les petites sociétés soulèvent des questions épistémologiques et méthodologiques originales et heuristiques pour des sciences sociales et humaines habituées aux perspectives de sociétés de moyennes et grandes tailles. Que voit-on et que vit-on à l’autre bout du regard que les grandes sociétés projettent sur le monde (Boucher et Thériault, 2005)? Peut-on faire de ce regard autre, de ce regard petit, non hégémonique et fragile, un outil heuristique pour comprendre les enjeux de nos sociétés contemporaines? Comment y réagit-on aux grands processus modernes, par exemple la mondialisation et ses appels à une convergence des cultures? Quelles sont les expressions les plus courantes de la « petitesse », ainsi que ses cas types historiques et contemporains? Comment entre-t-on, comment sort-on, comment mesure-t-on la « petitesse », politiquement, économiquement, culturellement, religieusement et cognitivement?
Ces questions sont discutées et ces notions sont employées au Québec depuis longtemps, et avec une vitalité renouvelée depuis quelques années. Déjà, François-Xavier Garneau, Lionel Groulx et Fernand Dumont réfléchissaient au Canada français et au Québec comme « petite nation ». Plus récemment, on recense notamment les ouvrages de Gérard Bouchard en études des mythes (2013a,b), Alain-G. Gagnon en études des sociétés plurinationales (2011), Stéphane Paquin (2001, 2016) et Hubert X. Rioux (2020) en économie politique, François Paré (1994a,b) et Isabelle Daunais (2015) en littérature, et Joseph Yvon Thériault (2005, 2020) en sociologie politique, souvent dans une perspective comparée, avec pour vis-à-vis les nations d’Europe centrale et orientale, les États scandinaves, les nations sans États souverains d’Europe de l’Ouest. Parfois même, ce sont des universitaires étrangers qui invitent les chercheurs québécois à concevoir leur société au prisme de la petitesse (Hughes, 1953). Cette fécondité pérenne du prisme d’analyse des petites sociétés invite à en consolider l’objectivation et à en poursuivre la problématisation (Cardinal et Papillon, 2011; Laniel, 2018, 2021).
Ce numéro spécial de Recherches sociographiques a pour objectif principal de fournir un bilan prospectif du champ d’études québécois des petites sociétés, tout en accueillant des études de cas sur le Québec qui placent en leur centre la notion ou la réalité des petites sociétés, notamment dans une perspective comparée. Par exemple, quels sont les principaux travaux sur le Québec comme petite société? Quelles questions soulèvent-ils? À quoi reconnaissent-ils et mesurent-ils la petitesse? Quelles disciplines en font un objet et un prisme d’analyse? Quel concept plus précis emploient-elles, et pourquoi? À quelles petites sociétés compare-t-on le Québec, et pourquoi? Quels sont les défis de ce champ d’études à la fois ancien et en émergence? Comment cette notion est-elle reçue et travaillée dans les réseaux savants internationaux? Peut-elle être élargie à l’étude de sociétés non occidentales? Quelles solidarités pourraient en émerger?
Le numéro spécial rassemblera des articles produits par des chercheur.euse.s issu.e.s des sciences sociales et humaines, ou d’autres disciplines apparentées.
SOUMISSION D’UNE PROPOSITION DE CONTRIBUTION
Pour soumettre une contribution à ce numéro spécial, les auteur.trice.s sont invité.e.s à nous faire parvenir en premier lieu une proposition d’article comprenant les informations suivantes :
- Nom de ou des auteur.trice.s, incluant l’affiliation, les coordonnées complètes ainsi qu’une courte notice biographique;
- 3 à 5 mots-clés;
- Proposition d’article sous forme de résumé (entre 250 et 500 mots, police Times New Roman 12 pts, double interligne), incluant une problématique, l’approche méthodologique privilégiée et un minimum de 5 références bibliographiques.
Ce numéro spécial est dirigé par le sociologue Jean-François Laniel, professeur à la Faculté de théologie et de sciences religieuses de l’Université Laval.
Les propositions de communication doivent être envoyées par courriel à jean-francois.laniel@ftsr.ulaval.ca avant le 1er septembre 2021.
CALENDRIER
26 avril 2021 : Lancement de l’appel à contributions
1 septembre 2021 : Date limite pour la soumission d’une proposition
15 septembre 2021 : Notification aux auteur.trice.s de l’acceptation de leur proposition
15 mars 2022 : Date limite pour la remise de l’article par les auteur.trice.s
BIBLIOGRAPHIE
Bouchard, Gérard, « The Small Nation with a Big Dream: Québec national myths (eighteenth-twentieth century) », dans G. Bouchard (dir.), National Myths: Constructed Pasts, Contested Presents, New York, Routledge, 2013a, p. 1-23.
Bouchard, Gérard, « Neoliberalism in Québec: The Response of a Small Nation Under Pressure », dans P. A. Hall et M. Lamont (dirs.), Social Resilience in the Neoliberal Era, Cambridge, Cambridge University Press, 2013b, p. 267-292.
Boucher, Jacques L. et Joseph Yvon Thériault (dirs.), Petites sociétés et minorités nationales. Enjeux politiques et perspectives comparées, Sainte-Foy, Presses de l’Université du Québec, 2005.
Cardinal, Linda et Martin Papillon, « Le Québec et l’analyse comparée des petites nations », Politique et Sociétés, vol. 30, no 1, 2011, p. 75-93.
Colomer, Josep M., Great Empires, Small Nations. The Uncertain Future of the Sovereign State, London & New York, Routledge, 2007.
Dahl, Robert A. et Tufte, Edward R., Size and Democracy, Stanford, Stanford University Press, 1973.
Daunais, Isabelle, Le roman sans aventure, Montréal, Boréal, 2015.
Delsol, Chantal, Michel Maslowski et Joanna Nowicki (dirs.), Mythes et symboles politiques en Europe centrale, Paris, Presses Universitaires de France, 2002.
Gagnon, Alain-G., Essais sur le fédéralisme et la diversité nationale, Québec, Presses de l’Université Laval, 2011.
Hughes, Everett C., « Regards sur le Québec », dans Jean-Charles Falardeau (dir.), Essais sur le Québec contemporain, Québec, Presses de l’Université Laval, 1953, p. 224.
Keating, Michael et Harvey, Malcom, Small Nations in a Big World. What Scotland Can Learn, Edinburgh, Luath Press Limited, 2015.
Laniel, Jean-François, « Le Québec, petite nation ou société neuve? Regard sur les paradigmes comparatifs du Québec », Jean-François Laniel et Joseph Yvon Thériault (dirs.), Le Québec et ses autrui significatifs, Montréal, Éditions Québec Amérique (à paraître, 2021).
Laniel, Jean-François, « On the Relevance of Small Nations. Religion and Politics in S.N. Eisenstadt’s Multiple Modernities Paradigm », Nations and Nationalism, vol. 24, no 4, 2018, p. 1076-1096.
Laniel, Jean-François et Joseph Yvon Thériault (dirs.), Les Petites Nations. Culture, politique et universalité, Paris, Classiques Garnier, 2020.
Paquin, Stéphane, La revanche des petites nations: Le Québec, l'Ecosse et la Catalogne face à la mondialisation, Montréal, Vlb éditeur, 2001.
Paquin, Stéphane, « Small nation versus small states: the case of Quebec », dans H. Baldersheim et M. Keating (dirs.), Small States in the Modern World. Vulnerabilities and Opportunities, Cheltenham & Northampton, Edward Elgar Publishing, 2016, p. 131-144.
Paré, François, Les littératures de l’exiguïté, Ottawa, Éditions du Nordir, 1994a.
Paré, François, Théories de la fragilité, Ottawa, Éditions du Nordir, 1994b.
Rioux, Hubert X., Small Nations, High Ambitions. Economic Nationalism & The Politics of Venture Capital in Quebec and Scotland, Toronto : University of Toronto Press, 2020.
Rokkan, Stein, « Nation-Building: A Review of Models and Approaches », Current Sociology, vol. 19, no 3, 1971, p. 7-38.
Steinmetz, Robert et Wivel, Anders (éd.), Small States in Europe. Challenges and Opportunities, Aldershot & Burlington, Ashgate, 2010.
Van Den Bulcke, Daniel, Alain Verbeke and Wenlong Yuan, Handbook on Small Nations in the Global Economy, Edward Elgar Publishing, 2009.
[1] Nous traduisons.
Nouveaux regards sur l’émigration canadienne-française et la Franco-Américanie
Recherches sociographiques sollicite des propositions d’articles en vue de la préparation d’un numéro spécial
Nouveaux regards sur l’émigration canadienne-française et la Franco-Américanie
Sous la direction d’Yves Frenette et Danielle Gauvreau
En 1964, Recherches sociographiques consacrait un numéro thématique à l’émigration des Canadiens français aux États-Unis. Malgré le fait qu’il ne compte que trois textes, ce numéro a une grande importance car il constitue un moment fondateur pour l’étude de l’exode massif des Canadiens vers la république du Sud entre 1840 et 1930. Rédigé par l’historien-économiste Albert Faucher, le premier article consiste en un essai d’appréhension globale du phénomène dans lequel l’auteur explique essentiellement pourquoi l’émigration des Canadiens français doit être vue comme un phénomène « normal » dans l’espace économique nord-américain à cette époque. Signé par Gilles Paquet, alors élève de Faucher, le second article propose une analyse spatio-temporelle fouillée du mouvement migratoire du nord au sud de la frontière, à partir de plusieurs angles et à l’échelle régionale; Paquet y pose les jalons d’un programme ambitieux visant à analyser ce qu’il qualifie d’« événement majeur de l’histoire canadienne-française du XIXe siècle », en citant Faucher (1961). Le numéro se termine par une note de recherche du sociologue Léon Bouvier portant sur la stratification sociale du « groupe ethnique canadien-français aux États-Unis » au milieu du XXe siècle; il y constate que l’avancement social des immigrants et des Canadiens français de deuxième génération a été plus timide que celui d’autres groupes, une situation qu’il attribue au maintien de certains traits culturels.
Au cours des quatre décennies suivantes, on assista à une explosion des études franco-américaines. En effet, plusieurs thèses, articles et livres, souvent influencés par la Nouvelle Histoire sociale, firent progresser les connaissances, particulièrement en Nouvelle-Angleterre, région de prédilection des migrants canadiens-français après 1850, mais aussi ailleurs aux États-Unis (Ramirez, 1992, 2003; Frenette, 2016; Lamarre 2016). Ces travaux ouvrirent notamment la voie à quatre synthèses parues entre 1986 et 1991 (Brault, 1986; Weil, 1989; Roby, 1990; Chartier, 1991). À l’occasion, Recherches sociographiques contribua à cet essor (Vicero, 1971; Anctil, 1981, 1982).
Après un certain ralentissement dans les deux premières décennies du XXIe siècle, les recherches sur la Franco-Américanie ont repris de plus belle, comme en témoigne la publication de deux ouvrages (Vermette, 2018; Lacroix, 2021a), d’un numéro thématique de revue (Frenette et Harton, 2019), d’articles scientifiques (Lacroix, 2018a, 2018b, 2020, 2021b; Lamarre et Dubé, 2021), de chapitres de livre (Pinette, 2019; Hurlburt, 2020, à paraître; Mimeault, 2020; Tissier, 2020; Frenette, Harton et Willis, à paraître; Gauvreau, à paraître; Harton et Robichaud, à paraître; Harton, Gauvreau et Frenette, à paraître; Roberts, à paraître; St-Hilaire, à paraître; Tremblay et Rouleau, à paraître; Willis, à paraître) et d’une édition de texte (Frenette et Martineau, 2018), ainsi que la soutenance récente de deux thèses de doctorat (Harton, 2017 et Lavoie, 2020). Ces études élargissent les perspectives diachroniques et géographiques sur les Franco-Américains en s’intéressant à la période avant 1840 ainsi qu’à l’ouest du continent; elles renouvellent l’étude de « vieux sujets », tels les processus migratoires, l’établissement en Nouvelle-Angleterre, les échanges épistolaires, les retours au Québec, les relations avec les Irlando-Américains, le maintien du français et les transferts linguistiques, ainsi que les relations des « Francos » avec le Québec; elles ouvrent de nouveaux chantiers, notamment sur la chose politique, sur la culture populaire, sur les relations de genre et sur l’identidé queer dans les communautés franco-américaines.
Soixante ans après la parution de son numéro thématique pionnier, Recherches sociographiques veut contribuer à cette effervescence en publiant un nouveau numéro thématique sur l’émigration canadienne-française et la Franco-Américanie ancienne et contemporaine, sous différents aspects. Les chercheuses et chercheurs sont encouragés à se pencher sur les thématiques suivantes (nullement limitatives) :
- Bilan des études sur l’émigration canadienne-française et acadienne aux États-Unis;
- Migrations secondaires des francophones sur le territoire étatsunien;
- Migrations de retour et impact des « rapatriés » au Québec rural et urbain;
- Parcours de vie des Franco-Américains à différentes époques;
- Relations de genre et transformations de la famille franco-américaine;
- Genèse et évolution des communautés franco-américaines;
- Rôle de l’Église catholique et vie religieuse franco-américaine;
- Évolution de la langue française aux États-Unis;
- Relations avec le Québec et avec la francophonie canadienne;
- Relations avec d’autres groupes ethnoculturels;;
- Politique franco-américaine;;
- Identités multiples;
- Construction d’une mémoire collective, familiale et individuelle;
- Intégration des migrants contemporains dans les communautés franco-américaines.
Les propositions d’article, d’une longueur d’environ 300 mots, doivent être transmises à :
Yves Frenette (yfrenette@ustboniface.ca) ou
à Danielle Gauvreau (danielle.gauvreau@concordia.ca)
avant le 31 octobre 2022. Les auteurs recevront une réponse des directeur/trice du numéro avant le 18 novembre 2022. Les articles seront attendus pour le 30 juin 2023. Recherches sociographiques publie des travaux de recherche originaux sur le Québec et sur le Canada français. Par son caractère interdisciplinaire, la revue fait appel aux sociologues, politologues, historiens, démographes, économistes, anthropologues, littéraires.
BIBLIOGRAPHIE
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Frenette, Y, et F. Martineau avec la collaboration de V. Benoit (2018), Les voyages de Charles Morin, charpentier canadien-français, Québec, Presses de l’Université Laval.
Frenette, Y., M.-E. Harton et J. Willis (à paraître), « Les travailleurs de la pierre canadiens-français sur le chantier du Capitole du Minnesota au tournant du 20e siècle », dans Y. Frenette, M.-E. Harton et M. St-Hilaire (dir.), Déploiements canadiens-français et métis en Amérique du Nord (18e-20e siècles), Ottawa, Musée canadien de l’histoire et Presses de l’Université d’Ottawa.
Gauvreau, D. (à paraître), « Des États-Unis au Québec. Aperçu des migrations de retour des Canadiens français, 1881-1921 », dans Y. Frenette, M.-E. Harton, et M. St-Hilaire, (dir.), Déploiements canadiens-français et métis en Amérique du Nord (18e-20e siècles), Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa.
Harton, M.-E. (2017), « Familles, communautés et régimes démographiques à travers le prisme du genre chez les Canadiens français en Amérique du Nord, 1880-1911 », thèse de doctorat (sociologie), Université Laval.
Harton, M.-E, D. Gauvreau et Y. Frenette (à paraître), « Partir pour la Nouvelle-Angleterre au début du 20e siècle : portrait d’une cohorte de migrants canadiens-français », dans
Y. Frenette, M.-E. Harton, et M. St-Hilaire, (dir.), Déploiements canadiens-français et métis en Amérique du Nord (18e-20e siècles), Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa.
Harton, M.-E. et L. Robichaud avec la collaboration de G. Thériault (à paraître) « Partir pour les «États» et s’y installer : réseaux de proximité résidentielle canadiens-français à Manchester (New Hampshire) en 1910 », dans Y. Frenette, M.-E. Harton, et M. St-Hilaire, (dir.), Déploiements canadiens-français et métis en Amérique du Nord (18e-20e siècles), Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa.
Hurlburt, S. (2020), « Réunions épistolaires : les lettres Bergevin 1880-1909 », dans Y. Frenette, I. C. Monnin et C. Nougaret (dir.), Dans leurs propres mots : la mobilité dans les écrits personnels et les correspondances, XVIIIe-XXe siècles, Winnipeg, Presses Universitaires de Saint-Boniface, p. 247-271.
Hurlburt, S. (à paraître), « French-Canadian Kin Networks and Secondary Migration : From Minnesota to Washington », dans Y. Frenette, M.- E. Harton et M. St-Hilaire (dir.), Déploiements canadiens-français et métis en Amérique du Nord (18e-20e siècles), Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa.
Lacroix, P. (2018a), « Parish and Nation : French Canada, Quebec, and Providential Destiny, 1880-1898 », The Historian, vol. 80, no 4, hiver, p. 725-748.
Lacroix, P. (2018b), « À l’assaut de la Corporation Sole : autonomie institutionnelle et financière chez les Franco-Américains du Maine, 1900-1917 », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 72, no 1, été, p. 31-51.
Lacroix, P. (2020), « An All American Town? Ethnicity and Memory in the Barre Granite Strike of 1922 », Vermont History, vol. 88, no 1, hiver/printemps, p. 35-56.
Lacroix, P. (2021a), « Tout nous serait possible » : une histoire politique des Franco-Américains, 1874-1945, Québec, Presses de l’Université Laval.
Lacroix, P. (2021b), « Prelude to the ‘Great Hemorrhage’: French Canadians in the United States, 1775-1840 », American Review of Canadian Studies, vol. 51, no 4, décembre, p. 554-572.
Lamarre, J. (2016), « Migration et présence des Canadiens français dans le Midwest : bilan historique et historiographique », Bulletin d’histoire politique, vol. 24, no. 2, hiver, p. 120-136.
Lamarre, J. et A. Dubé (2021), « Henri Bourassa, les Franco-Américains et la Première Guerre mondiale », Bulletin d’histoire politique, vol. 29, no 2, printemps, p. 201-215.
Lavoie, P. (2020), « Mille après mille : mobilité, célébrité et mémoire des artistes populaires après l’exode’ », thèse de doctorat (histoire), Université de Montréal.
Mimeault, M. (2020), « La correspondance d’Arthur Lamontagne (1881-1915) : quand famille et sacerdoce se conjuguent », dans Y. Frenette, I. C. Monnin et C. Nougaret (dir.), Dans leurs propres mots : la mobilité dans les écrits personnels et les correspondances, XVIIIe-XXe siècles, Winnipeg, Presses Universitaires de Saint-Boniface, p. 201-234.
Paquet, G. (1964), « L’émigration des Canadiens français vers la Nouvelle-Angleterre, 1870-1910 : prises de vue quantitatives », Recherches sociographiques, vol. 5, no 3 , septembre décembre, p. 319-370.
Pinette, S. (2019), « Horrible Mothers in Mémère’s Kitchen : Queer Identity in New England Franco-America », dans Loïc Bourdeau (dir.), Horrible Mothers : Failing Motherhood across North America, Lincoln, University of Nebraska, p. 41-56.
Ramirez, B. (1992), Par monts et par vaux : migrants canadiens-français et italiens dans l’économie nord-atlantique, 1860-1914, Montréal, Boréal.
Ramirez, B. avec la collaboration d’Y. Otis (2003), La ruée vers le Sud : migrations du Canada vers les États-Unis 1840-1930, Montréal, Boréal.
Recherches sociographiques (1964), « L’émigration des Canadiens français aux États-Unis », vol. 5, no 3, septembre-décembre, p. 277-394.
Roberts, E. (à paraître), « Nattering with the neighbors : Linguistic change in the Canadian Francophone community in the United States, 1910-1930 », dans Y. Frenette, M.-E. Harton et M. St-Hilaire (dir.), Déploiements canadiens-français et métis en Amérique du Nord (18e-20e siècles), Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa.
Roby, Y. (1990), Les Franco-Américains de la Nouvelle-Angleterre, 1776-1930, Sillery, Septentrion.
St-Hilaire, M. (à paraître), « Marier le horsain ou l’exilé ? Les aires matrimoniales québécoises, 1801-1900 : un espace social continental », dans Y, Frenette, M.-E, Harton et M. St-Hilaire (dir.), Déploiements canadiens-français et métis en Amérique du Nord (18e-20e siècles), Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa.
Tissier, J. (2020), « Échanges épistolaires, mobilité géographique et cléricalisme : la correspondance d’Adolphe Onésime Lacroix (1913-1938) », dans Y. Frenette, I. C. Monnin et C. Nougaret (dir.), Dans leurs propres mots : la mobilité dans les écrits personnels et les correspondances, XVIIIe-XXe siècles, Winnipeg, Presses Universitaires de Saint-Boniface, p. 235-246.
Tremblay, M. et G. Rouleau (à paraître), « Identification et descendance des principaux ancêtres d’origine franco-américaine au Québec », dans Y. Frenette, M.-E. Harton et M. St-Hilaire (dir.), Déploiements canadiens-français et métis en Amérique du Nord (18e-20e siècles), Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa.
Vermette, D. (2018), A Distinct Alien Race : The Untold Story of Franco-Americans : Industrialization, Immigration, Religious Strife, Montréal, Baraka Books, 2018.
Vicero, R. (1971), « Sources statistiques pour l’étude de l’immigration et du peuplement canadien-français en Nouvelle-Angleterre au cours du XIXe siècle », Recherches sociographiques, vol. 12, no 3, septembre-décembre, p. 361-377.
Weil, F. (1989), Les Franco-Américains, 1860-1980, Paris, Belin.
Willis, J. (à paraître), « Québec, Manitoba, Nouvelle-Angleterre : parcours d’une migrante canadienne-française, 1880-1930 », dans Y. Frenette, M.-E. Harton, M.-E. et M. St-Hilaire (dir.), Déploiements canadiens-français et métis en Amérique du Nord (18e-20e siècles), Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa.
Structures, représentations et pratiques de la sociologie au Québec
Recherches sociographiques sollicite des propositions d’articles en vue de la préparation d’un numéro spécial
Structures, représentations et pratiques de la sociologie au Québec
Sous la direction de Julien Larregue (Université Laval) et Jean-Philippe Warren (Université Concordia)
Bien que la sociologie soit, comme toute science, guidée par une visée universaliste (Merton 1973), les nombreux travaux qui ont été consacrés à des traditions nationales démontrent que la science des phénomènes sociaux est susceptible de revêtir des formes différentes dans le temps et l’espace : la sociologie n’est pas au Danemark (Kropp 2015) ce qu’elle peut-être en France (Heilbron 2015), cette dernière étant à maints égards distincte de ce que l’on peut observer en Italie (Cousin et al. 2022) ou au Royaume-Uni (Platt 2003). De la même façon, l’histoire de la sociologie québécoise francophone est intimement nationale (Warren 2003), tant et si bien qu’elle en est venue à être distinguée tant de la sociologie canadienne-anglaise (Warren 2011; Helmes-Hayes et Warren 2017) que de la sociologie francophone produite dans d’autres provinces canadiennes (Massicotte 2008).
L’existence de traditions nationales n’a jamais empêché d’étroits rapports aux sociologies étrangères. Comme l’a récemment rappelé Gisèle Sapiro (2022), « loin d’être homogènes, les champs disciplinaires, une fois établis, se structurent toujours autour du clivage entre un pôle national et un pôle international du point de vue des stratégies des chercheures ». Ainsi la sociologie québécoise (francophone et anglophone), tout en bâtissant ses propres trajectoires en fonction du milieu où elle s’est développée, s’est-elle largement construite à partir de l’importation et de la reconfiguration de courants de recherche initialement développés dans d’autres pays. Cet entrelacement de logiques nationales et internationales au sein du champ scientifique (Gingras 2002) est d’autant plus important à prendre en compte s’agissant du Québec puisqu’il s’agit d’un espace, d’une part, partiellement clivé sur le plan linguistique (Larivière 2018) et, d’autre part, largement exposé à la pression à l’américanisation de la recherche.
Prenant acte de la triple structuration de la discipline sociologique (nourries à la fois par des dynamiques universalistes, nationales et internationales), le présent numéro de Recherches sociographiques a pour but de faire oeuvre de réflexivité en retournant contre la discipline sociologique les outils que celle-ci a forgés pour étudier les espaces savants.
Les articles réunis devront donc pleinement s’inscrire dans une démarche de sociologie des sciences sociales (Fourcade 2009; Heilbron 2017; Joly 2017; Larregue 2020), tout en laissant également la porte ouverte à des traditions de recherche proches comme l’histoire des sciences ou la scientométrie. Quelle que soit l’orientation privilégiée, il est attendu que les propositions d’articles explicitent clairement la nature du matériau empirique qui sera mobilisé et que celui-ci soit articulé aux questionnements soulevés. Les propositions combinant de façon pertinente des analyses qualitatives et quantitatives seront tout particulièrement bienvenues.
Sans qu’elles ne doivent s’y limiter, les contributions pourront notamment porter sur les problématiques suivantes :
- le travail, passé et présent, de construction et de protection d’une conception « québécoise » de la sociologie;
- l’institutionnalisation de la discipline sociologique dans le temps et à travers les différentes universités québécoises (francophones et anglophones);
- les rapports que les sociologues québécois·es entretiennent avec des sociologies ou des sociologues d’autres pays;
- les relations de collaboration et/ou de concurrence que la sociologie entretient avec d’autres disciplines des sciences sociales (science politique, anthropologie, économie, criminologie, etc.);
- l’enseignement de la sociologie et le devenir professionnel des diplômé·es, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du champ scientifique;
- le profil social et la trajectoire professionnelle des sociologues, tant au sein qu’à l’extérieur du champ universitaire;
- la nature des productions scientifiques relevant de la sociologie (théories, méthodes, données, etc.) et leur place dans l’espace des sciences sociales;
- les pratiques de communication scientifique des sociologues, qu’il s’agisse des langues d’écriture ou des références mobilisées;
- la structuration, l’orientation et le fonctionnement des revues où publient les sociologues;
- les relais de la sociologie dans l’espace public, dont les champs médiatiques et politiques.
À noter que les propositions soumises peuvent élargir le spectre de leur analyse à d’autres régions. En particulier, les contributions qui cherchent à dresser des comparaisons avec ce qui se passe ailleurs (au Canada ou à l’étranger) pourront trouver place dans le dossier, pourvu qu’elles éclairent la situation de la sociologie québécoise.
En 1974, Jean-Charles Falardeau écrivait qu’il était important pour la sociologie de s’interroger sur son « devenir scientifique ». À près de cinquante ans d’intervalle, le dossier que nous proposons cherche à reprendre cette interrogation en l’actualisant. En se penchant
sur le passé et le présent de notre discipline, nous tentons, dans la mesure du possible, de mieux envisager son avenir.
MODALITÉS ET CALENDRIER
Les propositions d’article, d’une longueur maximale de 2000 mots (bibliographie comprise), devront parvenir aux coordinateurs du numéro le 31 août 2022 au plus tard à
jean-philippe.warren@concordia.ca
Elles détailleront le matériau mobilisé, les méthodes et les principaux arguments déployés dans l’article.
En cas d’acceptation de la proposition, l’article final devra être envoyé le 31 janvier 2023 au plus tard. Sa longueur pourra être variable et dépendra de la nature de la contribution. Elle oscillera cependant entre 40 000 et 60 000 caractères (espaces non-compris). L’article sera soumis au comité de lecture de Recherches sociographiques ainsi qu’à une évaluation extérieure. Le numéro paraîtra en 2023.
BIBLIOGRAPHIE
COUSIN Bruno, VITALE Tommaso, BARBERA Filippo, BARONE Carlo et SANTORO Marco, 2022, «Les mandarins et la horde bibliométrique», Socio-logos, 2022, no 17.
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Au-delà des clichés sur les immigrants et la langue au Québec
Recherches sociographiques sollicite des propositions d’articles en vue de la préparation d’un numéro spécial
Au-delà des clichés sur les immigrants et la langue au Québec
DESCRIPTION DE LA THÉMATIQUE
Dans la mouvance de l’adoption du projet de loi 96 (Loi 14) et des élections québécoises à l’automne 2022, les questions et les débats entourant le lien présumé entre l’immigration et le « déclin du français » au Québec, voire de la survie de la nation québécoise francophone, sont apparus sur un nombre sans cesse croissant de tribunes. Qu’il s’agisse de seuils d’immigration, de limites de la capacité d’accueil de la société québécoise, de pouvoirs et de gestion de l’immigration permanente et temporaire par le Québec, de politiques et de mesures de francisation, d’intégration et de régionalisation, pour ne mentionner que ceux- là, beaucoup a été dit sans pourtant toujours s’assurer d’offrir un portrait juste, nuancé et dénué de clichés sur ces enjeux.
Le gouvernement québécois s’est engagé à tout mettre en œuvre pour freiner le recul du français au Québec, lequel serait attribuable, selon certains, au fait que les immigrants ne parlent pas ni n’utilisent suffisamment cette langue. Très souvent, une telle lecture de la réalité repose sur des indicateurs dont la portée est plutôt limitée et qui font l’économie d’analyses qui prennent en compte la complexité et la richesse des dynamiques associées à la diversité ethnoculturelle, au plurilinguisme et à la concomitance du français comme langue publique commune et de l’anglais comme lingua franca globale.
Mais que sait-on du rapport qu’entretiennent les immigrants avec la langue française et la notion de « français langue publique commune »? Quelles représentations se font les immigrants, récents et établis, de la présence et du statut relatif du français et de l’anglais au Québec, et à Montréal en particulier? Lors du recensement de la population de 2021, près de 60 % de la population de langue maternelle tierce déclarait parler plus d’une langue à la maison. Que nous révèle ce plurilinguisme au foyer en regard des pratiques et des comportements linguistiques au travail, dans le domaine de l’enseignement postsecondaire, dans l’espace public en général? À quels défis les nouveaux arrivants sont-ils confrontés lorsque leur langue première n’est pas le français? Quels sont les facteurs qui modulent positivement ou négativement leur apprentissage du français? Que sait-on des succès voire des limites de ces mesures qui visent à favoriser l’apprentissage et l’usage du français? Quels rôles joue ou ne joue pas la société d’accueil pour valoriser et promouvoir l’usage du français auprès de certaines communautés immigrantes?
Dans le contexte sociopolitique actuel au Québec et au Canada, et compte tenu du rôle de l’immigration comme premier moteur de croissance de la population, les défis, les enjeux et les questions entourant l’adhésion des immigrants à la francophonie québécoise et canadienne sont de plus en plus au premier plan des discussions et des débats sur l’évolution de la présence et de l’usage du français dans l’espace public.
Or, si tant est que l’on cherche des solutions à ces enjeux, il va de soi que les initiatives et les mesures visant à valoriser et promouvoir l’usage du français auprès des nouveaux arrivants, voire des immigrants établis depuis plusieurs années, doivent s’appuyer sur des données probantes, des faits et des analyses bien documentés.
Ce numéro de Recherches sociographiques (RS) vise donc à fournir un éclairage au débat public sur ces enjeux et à favoriser un meilleur arrimage entre la recherche et les données probantes d’une part, et le développement de programmes et de mesures susceptibles de favoriser un meilleur vivre-ensemble linguistique d’autre part.
Longueur des articles :
Suivant les normes de la revue, la longueur de l'article se situera entre 20 et 35 pages à double interligne, pour un maximum de 60 000 caractères excluant les espaces. On peut obtenir plus d’information sur les normes d’édition de RS en consultant le lien suivant : Normes d'édition Recherches sociographiques (ulaval.ca)
Vous êtes invités à soumettre votre article à : jean-pierre.corbeil.1@ulaval.ca
Date limite pour soumettre un article : 15 novembre 2023
RESPONSABLES DE CE NUMERO THEMATIQUE
Jean-Pierre Corbeil, professeur associé au département de sociologie de l’Université Laval
Richard Marcoux, professeur titulaire au département de sociologie de l’Université Laval et directeur de l’Observatoire démographique et statistique de l’espace francophone (ODSEF)
Victor Piché, chercheur associé à la Chaire de recherche du Canada sur les dynamiques migratoires mondiales de l’Université Laval